lundi 25 février 2013

Le rôle politique du roi Albert II en 2011

Le Roi ne sera pas entendu :  le ministre d'Etat Johan Vande Lanotte ne parvient pas à trouver un accord entre les sept partis (PS, NVA, SPA, CDH, CD&V, Ecolo et Groen) et demande à être déchargé de sa mission en janvier 2011. Le 2 février, Albert II désigne un nouvel informateur, le vice-premier ministre Didier Reynders, afin de trouver une autre coalition de partis pour former le nouveau gouvernement. La famille libérale est désormais invitée à participer aux négociations. Parallèlement, le Roi demande au gouvernement sortant d'Yves Leterme de préparer le budget 2011 et de le présenter au Parlement.

Philippe Moureaux, vice-président du PS et bourgmestre de Molenbeek, déclare le 18 février au journal "La Libre Belgique" :  "Heureusement qu'on a encore un chef de l'Etat qui a beaucoup de patience, qui réussit chaque fois à remettre la machine en marche. Faisons-lui confiance. Il a aujourd'hui des pouvoirs que le roi des Belges n'a plus eus depuis des dizaines d'années. Même les partis de gauche applaudissent parce qu'ils préfèrent cela au vide. C'est un paradoxe extraordinaire. Et je suis de ceux qui applaudissent sans réticence. On a besoin de cela pour le moment. Et j'espère qu'il continuera avec le même talent".

Après la mission d'information de Didier Reynders, Albert II charge, le 2 mars, le jeune président du CD&V Wouter Beke de relancer les négociations sur la prochaine réforme de l'Etat.

Pendant ce temps, le Palais est confronté à la sortie de "Belgique, un roi sans pays". L'initiative est intéressante à double titre : consacrer tout un ouvrage au rôle politique d'Albert II (ce qui n'avait jamais été fait) et confier sa rédaction à un journaliste francophone (Martin Buxant de "La Libre Belgique") et à un journaliste néerlandophone (Steven Samyn de "De Morgen"), tous deux âgés d'une trentaine d'années. Pour mener leur enquête objective et sérieuse, ils ont rencontré des responsables politiques et des proches de la Cour.

Ce livre aborde très peu la première partie du règne d'Albert II (1993-2007) où il se mêle peu de politique et a un rôle presque protocolaire. Selon les auteurs, le Roi aurait voulu ne pas signer la loi dépénalisant l'euthanasie, mais il se serait ensuite laissé convaincre par le monde politique et n'aurait aujourd'hui aucun regret à ce sujet. En 2003, il aurait encouragé le gouvernement belge à ne pas envoyer de troupes en Irak, par crainte de voir notre pays menacé par le terrorisme. Mais il préférerait la politique pro-atlantiste du ministre de la Défense Pieter De Crem à celle plus humanitaire de son prédécesseur André Flahaut. Il manque un chapitre sur les initiatives prises par le couple royal suite à l'affaire Dutroux en 1996.

Ils racontent ensuite les décisions politiques prises par Albert II depuis 2007. Les problèmes communautaires l'ont en effet obligé à jouer un rôle nettement plus important. On découvre les coulisses de ce qui se passe derrière les grilles du palais, notamment l'influence des partis et de son chef de cabinet Jacques van Ypersele de Strihou. Le Roi prend quelques risques mais ne commet aucun faux pas. Il donne l'image d'un bon papa sympathique qui tente de recoller les morceaux entre Flamands et francophones. Mais il peut être aussi en colère, par exemple contre le jeune président du VLD Alexander De Croo qu'il accuse d'être responsable de la chute du gouvernement en 2010.

Des chapitres sont ensuite consacrés à l'entourage, au coût et à la foi de la famille royale, ainsi qu'aux personnes anoblies par le Roi. Les auteurs affirment que c'est la reine Paola qui s'opposerait à la reconnaissance officielle de Delphine Boël par son père. Ils évoquent ensuite les mauvaises relations entre le prince Philippe d'une part, et le monde politique, la presse et le chef de cabinet d'Albert II d'autre part, ainsi que le souhait de plusieurs partis d'une monarchie protocolaire (comme en Suède) pour le prochain règne.

Leur conclusion?   "Jusqu'ici, Albert II a pu slalomer entre les exigences des uns et des autres. Mais chacun, aujourd'hui en Belgique, pressent que cet exercice de style a atteint ses limites et n'est plus guère tenable. Jusqu'ici, Albert II a eu les épaules assez larges que pour ne pas laisser l'édifice royal s'effondrer. Mais tout porte à croire - de la difficulté de la succession royale à l'évolution des esprits de la classe politique en passant par un pays si particulier à gouverner - que le temps presse. Jusqu'ici, ce roi est à la tête d'un pays. Jusqu'ici ce pays a un roi. Jusqu'ici".

Si cet ouvrage intéressant est plutôt positif pour l'image d'Albert II, il brise cependant un tabou : le secret entourant les colloques singuliers entre le Roi et les responsables politiques. Certains ont été peu loquaces avec les deux journalistes, mais d'autres (comme Bart De Wever et Alexander De Croo qui n'avaient pas de bonnes relations avec le souverain durant la crise politique) ont raconté en détail leurs audiences royales. Cela ajoute donc une difficulté à la tâche d'Albert II qui devra être beaucoup plus prudent à l'avenir lors de ses consultations politiques...

Le Palais réagit le 5 mai :   "Plusieurs quotidiens ont publié ce matin des extraits d'un livre faisant état du contenu d'entretiens du Roi. Le Palais regrette que la discrétion du colloque singulier ne soit pas respectée. Cette discrétion a pour but de permettre au chef de l'Etat de remplir sa fonction. Certains des extraits publiés comportent des inexactitudes manifestes, notamment sur les entretiens du 16 juin et du 8 octobre 2010".

Entretemps, le Roi remet le Prix International Roi Baudouin pour le Développement 2011 au Docteur Denis Mukwege, récompensé pour son travail au Congo auprès des milliers de femmes victimes de violences sexuelles. Un mois plus tard, lors d'un sommet à New York, le premier ministre belge Yves Leterme remet au secrétaire-général de l'ONU Ban Ki-Moon une lettre personnelle d'Albert II pour encourager les Nations Unies à accorder suffisamment d'attention à la lutte contre les violences sexuelles faites aux femmes. Il est extrêmement rare qu'il écrive à une organisation internationale. Notre souverain en parle aussi dans son discours télévisé de la fête nationale :

"Nos problèmes internes ne doivent pas nous conduire vers un repli égoïste sur nous-mêmes et nous faire oublier le monde qui nous entoure. A ce propos, je voudrais partager avec vous l'émotion que j'ai ressentie lors de la remise du Prix International Roi Baudouin pour le Développement au médecin congolais Denis Mukwege. Dans des conditions très difficiles, il soigne et vient en aide aux femmes qui sont victimes de terribles violences dans l'est du Congo. J'appelle notre pays, l'Union Européenne et les Nations Unies à travailler efficacement avec les autorités du Congo et des pays voisins pour mettre fin à ce drame. Nous ne pouvons pas rester indifférents à de telles situations".

Revenons à la crise politique... Le 12 mai, Wouter Beke demande à Albert II de le décharger de sa mission sans avoir pu relancer les négociations. Après avoir reçu en audience les présidents de partis, le Roi accepte sa démission et nomme formateur Elio Di Rupo, président du PS et ministre d'Etat. Le 4 juillet, celui-ci présente au souverain et aux partis démocratiques un nouveau compromis pour la réforme de l'Etat, ainsi qu'une série de propositions socio-économiques pour assainir les finances publiques. Sept partis (PS, SPA, Ecolo, Groen, MR, VLD et CDH) acceptent cette base de négociations, mais ils n'ont pas la majorité des 2/3 au Parlement pour entreprendre une réforme de l'Etat. Elio Di Rupo apporte sa démission au roi Albert qui la garde en suspens, le temps de laisser quelques jours au formateur pour tenter de convaincre le CD&V de rejoindre les sept partis.

Le Roi se montre très irrité lors de son discours du 21 juillet :   "En cette fête nationale, j'aurais aimé me réjouir avec vous de la prestation de serment d'un nouveau gouvernement fédéral de plein exercice. Nous n'en sommes hélàs pas là, et je le déplore. Entretemps, pendant cette longue négociation, le gouvernement en affaires courantes a su prendre efficacement les mesures nécessaires pour préserver dans l'avenir proche le bien-être des citoyens. Toutefois, cela ne diminue en rien l'urgence et la nécessité de former un gouvernement investi de pleines responsabilités et qui devra réaliser les réformes structurelles nécessaires dans les domaines institutionnel et socio-économique. De là mon nouvel appel à tous les citoyens et en premier lieu aux responsables politiques.

Un célèbre constitutionnaliste anglais, Walter Bagehot, précisait les prérogatives de la monarchie constitutionnelle comme suit :  le droit d'être informé, le droit d'encourager et le droit de mettre en garde. Ces derniers mois, dans mes audiences, j'ai beaucoup utilisé les deux premières prérogatives : être informé et encourager. Avec vous, je voudrais à présent faire usage publiquement, en toute transparence, de la troisième prérogative : le droit de mettre en garde. Je le fais fortement et avec conviction pour les raisons suivantes.

1° Comme un très grand nombre de Belges, je suis affligé par la plus longue durée, de mémoire d'homme, de formation d'un gouvernement. Cela crée chez beaucoup d'entre vous un sentiment d'inquiétude quant à l'avenir. J'ai pu m'en rendre compte lors de mes visites dans les différentes régions.

2° La durée de cette crise suscite aussi, dans une grande partie de la population, de l'incompréhension vis-à-vis du monde politique qui n'apporte pas de solution aux problèmes. Cela risque de développer une forme de poujadisme qui est dangereuse et néfaste pour la démocratie.

3° Si cette situation perdure longtemps encore, elle pourrait affecter de façon négative et très concrète le bien-être économique et social de tous les Belges. Il faut en être bien conscient.

4° Un des atouts importants de la Belgique, depuis la seconde guerre mondiale, est son rôle au sein de l'Europe. Cela nous a valu de devenir de fait, comme pays, la capitale de l'Europe et de jouer un rôle moteur dans cette formidable aventure qu'est la construction européenne. Notre pays, avec sa diversité culturelle, était considéré d'une certaine manière comme un modèle pour l'Union Européenne. Notre situation actuelle crée de l'inquiétude auprès de nos partenaires, et pourrait endommager notre position au sein de l'Europe, voire l'élan même de la construction européenne déjà mis à mal par les eurosceptiques et les populistes.

Je ne serais donc pas fidèle à mon rôle, si je ne rappelais pas solennellement les risques qu'une longue crise fait courir à tous les Belges, et si je n'exhortais pas à nouveau tous les hommes et toutes les femmes politiques, et ceux qui peuvent les aider, à se montrer constructifs et à trouver rapidement une solution équilibrée à nos problèmes. Comme je le rappelais à l'occasion de la Noël, et je cite :

"Dans la recherche de cet accord raisonnable, il est évident que chaque partie devra faire des concessions. Chacun aura donc l'obligation de prendre ses responsabilités. Le moment est venu où le vrai courage consiste à chercher fermement le compromis qui rassemble, et non à exacerber les oppositions. Si un tel accord se réalise, un nouveau gouvernement fédéral pourrait être constitué. Avec les entités fédérées, il sera à même de prendre des mesures nécessaires pour sauvergarder le bien-être de la population, et pour rétablir la confiance au sein du pays"  (fin de citation)

Mais les citoyens ne doivent pas seulement exhorter leurs représentants à prendre les décisions courageuses qui s'imposent. Ils doivent aussi s'efforcer de favoriser une meilleure entente entre nos communautés en faisant des pas concrets vers l'autre, en parlant sa langue, en s'intéressant à sa culture, en essayant de mieux le comprendre. C'est là une forme importante de citoyenneté moderne".

Dans la nuit du 21 au 22 juillet, Elio Di Rupo fait part au Roi que huit partis (PS, SPA, Ecolo, Groen, MR, VLD, CDH et CD&V), disposant de la majorité des 2/3 au Parlement, sont d'accord d'entreprendre des négociations à la mi-août. Le parti nationaliste flamand NVA de Bart De Wever est relégué dans l'opposition.

Un accord sur la future réforme de l'Etat intervient enfin à la mi-octobre et le Palais ne cache pas que "le Roi s'en est réjoui vivement". Les deux partis écologistes (Ecolo et Groen) sont ensuite envoyés dans l'opposition par leurs partenaires, désireux de former une coalition gouvernementale à six. Le 21 novembre, suite au blocage des négociations socio-économiques, Elio Di Rupo se rend au château de Ciergnon pour demander au souverain de le décharger de sa mission de formateur. Il refuse et fait publier le communiqué suivant :  "Le Roi rappelle la gravité de la situation actuelle et souligne que la défense de l'intérêt général de tous les Belges et les échéances européennes nécessitent une résolution très rapide de la crise politique. Il demande que chaque négociateur prenne dans les heures à venir un temps de réflexion pour mesurer les conséquences d'un échec et chercher activement une solution".

Nouveau communiqué le lendemain après avoir reçu en audience à Ciergnon les présidents des six partis :   "Le Roi demande à chacun des six partis d'accomplir l'effort additionnel nécessaire pour clôturer les négociations budgétaires et socio-économiques et former un gouvernement dans les meilleurs délais".  Un accord intervient quelques jours plus tard et Elio Di Rupo vient l'expliquer le 1er décembre à Albert II. La prestation de serment du nouveau gouvernement (PS, SPA, CDH, CD&V, MR et VLD) a lieu le 6 décembre au château de Laeken. Le lendemain, le premier ministre sortant Yves Leterme est nommé ministre d'Etat.

Le Roi se montre soulagé dans son discours de Noël 2011 :

"Aujourd'hui, je puis enfin me réjouir vivement avec vous des accords réalisés et de la formation d'un nouveau gouvernement fédéral de plein exercice. Cela prouve que notre pays demeure capable de réaliser des compromis qui rassemblent, tant sur le plan communautaire qu'en matière économique et sociale. Bien sûr, cela ne signifie pas que tout soit résolu pour autant. Plusieurs défis nous attendent.

Tout d'abord, il va falloir traduire en textes de loi les réformes institutionnelles profondes qui ont été décidées. Elles donneront aux entités fédérées davantage de compétences, une plus grande autonomie fiscale et une responsabilisation accrue. Cette transformation doit se réaliser sans nostalgie et avec la ferme volonté de voir ce nouveau projet pour notre pays réussir pleinement.

En même temps, le gouvernement devra faire face à des défis économiques et sociaux énormes. Là aussi, des décisions rigoureuses ont été prises afin de préserver à terme le bien-être de la population. Chacun devra cependant contribuer, en fonction de ses capacités, aux sacrifices nécessaires pour rétablir au plus vite les finances publiques de notre pays. Mais suffit-il de mettre en oeuvre des réformes institutionnelles et économiques pour faire progresser notre pays de façon décisive?

C'est essentiel mais pas suffisant. Il importe que ces réformes s'accompagnent d'une évolution profonde de nos mentalités. A ce sujet, je pense d'abord à une meilleure compréhension entre les citoyens de nos différentes communautés et régions. Il serait quand même incompréhensible, à une période où il est tant question de globalisation, d'ouverture aux autres cultures sur le plan international, que l'entente entre voisins immédiats, au sein d'un même pays, soit déficiente.

Veillons donc à mieux comprendre la culture, la mentalité des uns et des autres. Nous percevrons alors les complémentarités qui existent entre nos diverses communautés et régions. Nous réaliserons combien ces complémentarités sont une richesse qui favorise la tolérance et la créativité. Encourageons des projets qui mobilisent les citoyens à mieux se connaître. Rejetons fermement les caricatures simplistes et injustes de l'autre, qui attisent les préjugés et les antagonismes stériles et sèment la division. Je suis convaincu que si nous avançons sur cette voie, de nouvelles formes de collaboration se développeront entre nos entités fédérées, devenues plus autonomes. C'est ce qui s'est passé dans le monde universitaire.

Veillons enfin, dans la période économique la plus difficile depuis la seconde guerre mondiale, à préserver au mieux la tradition de dialogue entre partenaires sociaux, qui est un des grands acquis de notre pays. Le souci de cohésion sociale doit être une préoccupation constante pour tous. Maintenant que nous avons retrouvé notre capacité à résoudre nos difficultés intérieures, nous sommes à nouveau crédibles sur le plan international pour reprendre notre rôle de pionnier dans la construction européenne. Dans de nombreux domaines, seule une Europe cohérente est en mesure de répondre aux grands défis que nous connaissons actuellement. Nous pouvons y contribuer efficacement".


mardi 19 février 2013

Le rôle politique du roi Albert II en 2010

Dans son discours de Nouvel An 2010 aux autorités du pays, le Roi déclare :  "J'aimerais vous parler d'un sujet particulier : il s'agit des qualités qui sont attribuées aux Belges, et comment faire pour assurer la persistance de ces qualités. Plusieurs événements récents touchant des compatriotes qui oeuvrent dans des domaines bien différents m'ont impressionné. Il y eut la désignation du premier président permanent du Conseil Européen, le retour de notre astronaute après une mission de six mois dans l'espace, le renouvellement du mandat du président du Comité Olympique International, le lancement d'initiatives nouvelles par le président de la Banque Européenne d'Investissement, la désignation du procureur du Tribunal Pénal International pour l'ex-Yougoslavie, et les performances internationales de nos artistes et de nos sportifs de top niveau.

Ces remarquables consécrations publiques de personnalités belges ne doivent pas nous faire oublier des réalisations de grande qualité accomplies collectivement par des Belges. Songeons à nos militaires à l'étranger qui se distinguent par l'excellence de leurs interventions dans beaucoup de domaines et dans de multiples régions du monde, à l'équipe qui a développé une nouvelle station polaire belge, à nos scientifiques, à nos centres de recherche performants dans nombre de disciplines, et aux organisateurs d'événements culturels internationaux comme le Concours Musical Reine Elisabeth ou le festival Europalia.

A chaque fois, le monde extérieur a souligné un nombre de qualités qui seraient spécifiques des Belges : il y a notre ouverture aux autres cultures, notre créativité pour trouver des compromis, notre pragmatisme, une certaine modestie et notre faculté de ne pas nous prendre trop au sérieux. Beaucoup de ces qualités sont liées au caractère multiculturel de notre pays et au fait que nous nous trouvons aux frontières de deux grandes cultures européennes, le monde latin et le monde germanique. L'influence de ces cultures différentes nous procure l'avantage d'acquérir une disposition d'accueil et de compréhension des autres, de nous adapter avec pragmatisme à des situations diverses, voire les plus inattendues ou même surréalistes. Assurer la permanence de ces qualités chez nos concitoyens se fera en maintenant et en renforçant les échanges au sein de notre propre pays tout comme sur le plan international.

Se rencontrer, se parler, crée des relations, ouvre des perspectives dont on ne soupçonne pas toujours a priori les conséquences bénéfiques. C'est un extraordinaire moyen d'habituer nos jeunes aux contacts avec d'autres cultures, de les préparer à réconcilier des points de vue différents. Concrètement, cela implique, entre autres, de stimuler l'apprentissage de nos trois langues nationales, mais aussi de l'anglais et d'autres langues. Etre multilingue est un atout énorme et une qualité très appréciée dans la vie professionnelle. Le nombre des investisseurs étrangers dans notre pays en témoigne. Il est nécessaire aussi d'inciter davantage encore les jeunes à suivre des formations et des stages à l'étranger, que ce soit à travers les programmes Erasmus, ou par l'intermédiaire du Fonds Prince Albert qui envoie des jeunes acquérir de l'expérience dans des entreprises belges à l'étranger. J'ai reçu les lauréats de ce Fonds à l'occasion de nos 50 ans de mariage et j'ai été impressionné par leur ouverture d'esprit et leur enthousiasme.

Comme je viens de le dire, il importe bien sûr de développer les échanges au sein de notre propre pays, notamment entre écoles secondaires, hautes écoles ou universités de nos communautés. C'est l'objectif principal du Fonds Prince Philippe qui chaque année permet à de très nombreux jeunes de mieux connaître une autre région ou une autre culture de notre pas. Il est précieux aussi que nos universités poursuivent et renforcent leurs échanges avec une ou plusieurs universités d'une autre communauté. Il en est de même pour la collaboration entre chercheurs. Lors d'une récente visite à un pôle d'attraction universitaire, j'ai été saisi de voir combien la collaboration entre nos meilleurs scientifiques de communautés différentes était fructueuse et conduisait à des résultats concrets de grande valeur.

C'est également le cas dans le domaine culturel. J'ai vu avec grand intérêt combien, à Bruxelles, les principaux artistes et les institutions culturelles liées aux différentes communautés collaboraient efficacement et avec facilité. Dans le monde politique, les contacts entre responsables issus de nos communautés doivent également se renforcer. On a pu constater, encore récemment, combien il était précieux d'avoir des hommes politiques qui puissent jouer le rôle de médiateur dans certaines situations. Pour cela, il leur faut, bien entendu, connaître chaque communauté, chaque région. Enfin, valorisons pleinement le rôle central de notre pays en Europe. Bruxelles, capitale de l'Europe, est un atout considérable pour l'ensemble de notre pays, que ce soit sur le plan économique, culturel ou politique. Utilisons cette chance que l'histoire et la géographie nous ont offerte.

Pour conclure, je crois que c'est en accentuant ou en rétablissant toutes ces relations dans les différents domaines que nous maintiendrons et développerons les qualités qui nous sont attribuées internationalement. Nous le ferons évidemment dans le respect de l'identité propre de chaque communauté, de chaque région, et dans un esprit de loyauté fédérale".

Le 30 juin 2010, Albert et Paola sont les invités d'honneur du président Joseph Kabila lors de la cérémonie organisée pour le cinquantième anniversaire de l'indépendance du Congo. Au cours de son séjour, le couple royal effectue quelques visites sociales et économiques liées à notre pays, rencontre le secrétaire général de l'ONU Ban Ki-Moon, mais ne prononce aucun discours afin de ne pas créer des tensions dans les relations belgo-congolaises qui sont parfois tendues. Une polémique survient cependant après leur retour en Belgique lorsque la presse révèle que Mme Kabila a offert une parure de diamants à la reine Paola. Ce coûteux cadeau contraste avec la pauvreté des Congolais. Aussi le Palais annonce que les bijoux ont été remis à la Donation Royale. Lors de la fête nationale 2010, Albert confiera dans son discours :  "Nous avons pu proposer aux autorités congolaises un nouveau partenariat, franc et constructif, axé sur les besoins de la population congolaise et soutenant les nouvelles institutions que le Congo s'est donnés démocratiquement. Notre vif espoir est qu'un tel partenariat entre nos pays puisse contribuer à consolider la paix en Afrique centrale qui a tellement souffert. Cette paix est aussi vitale pour l'indispensable développement économique et social auquel notre pays est prêt à collaborer activement".

Revenons en Belgique... Une nouvelle crise politique survient en avril 2010. Sous l'impulsion de son jeune président Alexander De Croo, le VLD quitte la majorité suite à l'absence d'accord sur Bruxelles-Hal-Vilvorde au terme de la mission de Jean-Luc Dehaene. Yves Leterme remet la démission de son gouvernement au Roi qui la tient en suspens et explique sa décision dans le communiqué publié par le Palais :   "Le Roi et le premier ministre ont souligné combien, dans les circonstances actuelles, une crise politique serait inopportune et porterait un grave préjudice d'une part au bien-être économique et social des citoyens et d'autre part au rôle de la Belgique sur le plan européen". Après avoir rencontré les présidents de la Chambre, du Sénat et des partis démocratiques, les partenaires sociaux, Albert II charge Didier Reynders, vice-premier ministre et président du MR,  "de s'assurer dans très court délai de ce que les conditions sont remplies pour la reprise rapide des négociations sur des problèmes institutionnels et en particulier celui de Bruxelles-Hal-Vilvorde" , selon les termes du communiqué diffusé par le Palais. Mais la confiance est rompue entre les partis de la majorité et les négociations ne reprennent pas. Après avoir à nouveau reçu en audience les présidents de partis, Albert II accepte la démission du gouvernement. Les Chambres sont dissoutes.

Les élections fédérales ont lieu le 13 juin. Le Parti Socialiste est le grand vainqueur en Wallonie tandis que la NVA devient le premier parti de Flandre. L'extrême-droite continue de baisser :  le Vlaams Belang perd 5 sièges à la Chambre et le Front National n'a plus aucun sénateur et député fédéral. Après trois jours de consultation, le Roi nomme informateur Bart De Wever, le président de la NVA. Le 8 juillet, il demande à être déchargé de sa mission sans avoir obtenu d'accord. Le même jour, Elio Di Rupo, le président du PS, est nommé pré-formateur par Albert II.

Dans son discours de la fête nationale 2010, le Roi évoque brièvement la situation politique :  "Notre pays a été secoué par des tensions communautaires qui ont conduit à des élections anticipées et qui causèrent d'importants glissements politiques. A présent, ce qui importe, c'est de se tourner vers l'avenir. Il y a donc lieu de préparer pour nos régions et communautés de nouvelles formes de vie commune où chacun se sent bien, de résoudre les questions épineuses qui ont divisé, et de trouver de nouveaux équilibres entre le fédéral et les entités fédérées".

Le 18 août, Elio Di Rupo fait part au Roi des progrès obtenus et des difficultés à surmonter. Albert II décide de rencontrer les présidents des sept partis participant aux négociations. Le ministre d'Etat Louis Tobback confie à la presse :   "Je suis et reste un républicain. Mais dans de telles circonstances, la monarchie montre toute son utilité. Tous les politiciens qui réclament un rôle protocolaire pour la monarchie depuis des décennies doivent maintenant examiner la situation. Le Roi est très respecté. Lorsqu'il parle, il est écouté".  Les négociations reprennent le 21 août.

Une semaine plus tard, le projet de compromis de la réforme de l'Etat proposé par Elio Di Rupo est accepté par cinq partis (PS, SPA, CDH, Ecolo et Groen), mais n'obtient pas le soutien de la NVA et du CD&V. La famille libérale n'a pas été conviée aux discussions. Le pré-formateur demande à Albert II d'être déchargé de sa mission. Celui-ci refuse et lui demande de faire un nouvel essai qui n'aboutit pas à un accord. Aussi après avoir à nouveau reçu en audience les présidents des sept partis, le Roi demande, le 4 septembre, aux présidents de la Chambre André Flahaut (PS) et du Sénat Danny Pieters (NVA) un travail de médiation sur les désaccords rencontrés par le pré-formateur. Pas de résultat. Même mission pour le président de la NVA Bart De Wever le 8 octobre. Pas de résultat. Et pour le ministre d'Etat Johan Vande Lanotte le 21 octobre.

En novembre, le président du PS Elio Di Rupo parle pour la première fois d'Albert II depuis les élections :  "J'ai toujours trouvé que le Roi avait une maîtrise totale de la situation. C'est la personnalité qui connaît le mieux la situation du pays. Il agit dans l'intérêt du pays. Celles et ceux qui pensent que le Roi peut être influencé se trompent. Personne ne l'influence. Il sait où il va. Il compose avec la réalité du pays, très différente au nord et au sud".  Cet avis n'est pas partagé par le président de la NVA Bart De Wever qui déclare en décembre :  "Le problème, c'est que le Roi joue encore un rôle politique. Quand il y a une crise, le rôle du Roi est important. Pour nous, Flamands, cela pose un problème parce que le Roi ne pense pas comme nous. Pour les Wallons, c'est un avantage car ils sont alliés avec lui".

Dans son discours télévisé de Noël, Albert II évoque la réussite de la présidence belge de l'Union Européenne, puis la crise politique :   "Cet art du compromis, il me semble qu'au sein de notre propre pays, nous l'avons quelque peu oublié ces dernières années. D'où ma préoccupation et ma ferme volonté de lancer un appel à tous nos responsables et à tous les citoyens.

Notre pays a l'occasion de se transformer en profondeur pour mieux répondre aux attentes de nombreux Belges, et pour affronter les défis à venir. Désormais, après plus de six mois de négociations, tous les éléments sont sur la table pour réaliser une profonde réforme de l'Etat. Il y aurait un important transfert de compétences aux régions et communautés, une autonomie et une responsabilisation beaucoup plus poussées des entités fédérées, y compris sur le plan fiscal, un refinancement de Bruxelles et le maintien d'une réelle solidarité au sein de notre pays. En même temps, il sera nécessaire d'assurer le financement dans la durée de l'Etat fédéral pour exercer les compétences et les obligations qu'il continuera à assumer vis-à-vis de tous les Belges, mais aussi sur le plan européen et dans le monde. Il faudra également inclure une solution pour Bruxelles-Hal-Vilvorde et définir des règles en matière d'éthique politique.

Il s'agit donc de trouver des compromis équilibrés qui tiennent compte des aspirations légitimes des uns et des autres. Dans un tel accord, il ne doit pas avoir de perdants. Nous devons trouver des solutions où chacun est gagnant. Dans la recherche de cet accord raisonnable, il est évident que chaque partie devra faire des concessions. Chacun aura donc l'obligation de prendre ses responsabilités. Le moment est venu où le vrai courage consiste à chercher fermement le compromis qui rassemble, et non à exacerber les oppositions.

Si un tel accord se réalise, un nouveau gouvernement fédéral pourrait être constitué. Avec les entités fédérées, il sera à même de prendre des mesures nécessaires pour sauvegarder le bien-être de la population et pour rétablir la confiance au sein du pays. C'est cela que tous nos concitoyens attendent. Lorsque nous réussirons, car je suis convaincu que nous le pouvons, nous redeviendrons à nouveau un exemple d'entente et un facteur d'unité dans un monde qui en a grandement besoin. Nous pourrons présenter l'image juste d'un pays qui parvient dans la paix, à se transformer profondément. Nos partenaires européens, et tous les autres pays, constateront que la Belgique demeure un Etat responsable auxquels ils peuvent faire confiance. Cet appel que je vous lance solennellement à tous, je l'adresse évidemment en premier lieu aux responsables politiques, mais aussi aux responsables économiques, sociaux, culturels et des médias. Tous, par nos actions et par notre comportement, nous devons avoir le courage d'être des artisans de paix".

lundi 4 février 2013

Activités royales en janvier 2013

14 audiences pour le Roi :  le premier ministre Elio Di Rupo (reçu 4 fois), la présidente du VLD Gwendolyn Rutten, le ministre des Affaires étrangères Didier Reynders, le nouveau ministre de la Coopération Jean-Pascal Labille venu prêter serment, le ministre des Pensions Alexander De Croo, le gouverneur de la Banque Nationale de Belgique Luc Coene, la ministre de l'Intérieur Joëlle Milquet, ainsi que les ambassadeurs d'Italie, Turquie, Nouvelle-Zélande et Tunisie.

4 activités officielles pour le Roi :  réception de Nouvel An pour les ambassadeurs étrangers, réception de Nouvel An pour les autorités européennes, réception de Nouvel An pour les responsables de l'Otan et du Shape, réception de Nouvel An pour les autorités belges.

6 activités officielles pour la reine Paola :  réception de Nouvel An pour les ambassadeurs étrangers, réception de Nouvel An pour les autorités européennes, réception de Nouvel An pour les responsables de l'Otan et du Shape, réception de Nouvel An pour les autorités belges, concert de gala de la Chapelle Musicale Reine Elisabeth, lancement à Child Focus de la 10ème Journée mondiale pour un Internet plus sûr.

0 activité officielle pour la reine Fabiola.

8 activités officielles pour le prince Philipe : réception de Nouvel An pour les ambassadeurs étrangers, réception de Nouvel An pour les responsables de l'Otan et du Shape, réception de Nouvel pour les autorités belges, inauguration du Salon de l'Auto, audience pour le secrétaire général du parti communiste du Vietnam, journée internationale de commémoration des victimes de l'Holocauste, forum économique de Davos, congrès interdisciplinaire du développement durable à Namur.

7 activités officielles pour la princesse Mathilde :  réception de Nouvel An pour les ambassadeurs étrangers, réception de Nouvel An pour les responsables de l'Otan et du Shape, réception de Nouvel An pour les autorités belges, lancement du timbre émis pour ses 40 ans, colloque sur la pauvreté infantile, forum économique de Davos, conférence nationale sur l'éducation financière.

4 activités officielles pour la princesse Astrid :  visite au siège de la FIFA à Zürich, forum économique de Davos, table ronde sur la recherche clinique en Belgique, réception de Nouvel An pour les autorités belges.

1 activité officielle pour le prince Lorenz : réception de Nouvel An pour les autorités belges.

1 activité officielle pour le prince Laurent :  réception de Nouvel An pour les autorités belges.

3 activités officielles pour la princesse Claire :  inauguration de logements rénovés par la Fondation Pro Renovassitance (dont elle est la présidente d'honneur), spectacle du Sparadrap Circus, réception de Nouvel An pour les autorités belges.

Récapitulatif des activités officielles de janvier 2013 :

Roi :  4 activités officielles + 14 audiences

Prince Philippe :  8 activités officielles

Princesse Mathilde :  7 activités officielles

Reine Paola :  6 activités officielles

Princesse Astrid :  4 activités officielles

Princesse Claire :  3 activités officielles

Prince Laurent :  1 activité officielle

Prince Lorenz :  1 activité officielle

Reine Fabiola :  0 activité officielle