lundi 23 janvier 2012

Les 39 ans de la princesse Mathilde de Belgique

Mathilde est née à Uccle le 20 janvier 1973. Son papa, Patrick d'Udekem d'Acoz, est originaire de Poperinge en Flandre occidentale et ses deux oncles ont fait de la politique au sein du CVP (tous trois seront titrés comtes par le Roi en 1999). Grâce à sa maman Anna Komororski, elle est liée à toute la noblesse polonaise. Mathilde passe une enfance paisible au château de Losange (province de Luxembourg) en compagnie de ses trois soeurs et de son frère. Après des études primaires à l'Ecole Notre-Dame de Bastogne, elle fréquente l'Institut de la Vierge Fidèle à Bruxelles. En 1991, Mathilde choisit d'étudier la logopédie à l'Institut Marie Haps (Bruxelles), où elle obtient trois ans plus tard son diplôme avec grande distinction. Tout en poursuivant des études de psychologie à l'Université Catholique de Louvain-la-Neuve, elle ouvre un cabinet de logopédie dans la capitale belge. Comme toute sa famille, Mathilde est marquée en 1997 par le décès de sa grand-mère maternelle et de sa soeur Marie-Alix (23 ans) dans un accident de voiture. Le prince Philippe de Belgique est présent aux funérailles.

Le 10 septembre 1999, le Palais confirme la rumeur de mariage du prince héritier (39 ans) et de Mathilde d'Udekem d'Acoz (26 ans) parue le matin dans la presse. Trois jours plus tard, la fiancée de Philippe est présentée dans les jardins du château de Laeken, et suscite l'enthousiasme et la sympathie.

Le mariage a lieu le 4 décembre 1999. Mathilde porte une robe fourreau du couturier Edouard Vermeulen, le voile en dentelles de la famille Ruffo di Calabria et un diadème ayant appartenu aux reines Elisabeth et Astrid. La cérémonie civile se déroule en l'hôtel de ville de Bruxelles et est présidée par le chevalier François-Xavier de Donnéa, bourgmestre de la capitale. Le mariage religieux est célébré par le cardinal Godfried Danneels dans la cathédrale Saints-Michel-et-Gudule en présence du Gotha, de plusieurs présidents de la République, des présidents de la Commission Européenne et du Parlement Européen. L'Association de la Noblesse du Royaume de Belgique lui offre un diadème feuillagé composé de 631 diamants et réalisé en 1912 par le joaillier londonien Hennell and Sons pour une certaine Mrs Helen May White.

Après leur voyage de noces en Inde, le couple s'installe au château de Laeken, que la reine Fabiola avait quitté un an auparavant. Ils auront quatre enfants : la princesse Elisabeth (2001), le prince Gabriel (2003), le prince Emmanuel (2005) et la princesse Eléonore (2008). Leur vie privée loin de la jet-set n'a jamais donné lieu à aucun scandale.

Après le Roi et le prince Philippe, la princesse Mathilde est la troisième membre de la famille royale la plus active (166 activités officielles en 2011). Elle participe aux grands événements de la Cour et à certaines missions économiques à l'étranger de son mari. C'est surtout dans le domaine social qu'elle s'investit (la culture l'attire moins) : les droits de l'enfant, la protection des femmes, le micro-crédit, l'alphabétisation, la maladie d'Alzheimer, le sida, le cancer, la pauvreté infantile, la coopération au développement, etc. En 2000, elle crée le Fonds Princesse Mathilde qui soutient chaque année financièrement des projets en Belgique susceptibles d'améliorer la situation des personnes vulnérables (plus d'infos sur le Fonds : http://familleroyalebelge.blogspot.com/2009/06/le-fonds-princesse-mathilde.html).

Depuis plusieurs années, la princesse collabore étroitement avec les Nations Unies. En 2002, elle emmène la délégation belge à la Conférence des Nations Unies sur les Droits de l'Enfant (comme l'avaient fait le roi Baudouin et la reine Fabiola en 1990). Les Nations Unies lui demandent en 2005 d'être émissaire pour la promotion du micro-crédit au cours de l'Année Internationale du Micro-Crédit (plus d'infos sur son combat pour le micro-crédit : http://familleroyalebelge.blogspot.com/2011/11/le-combat-de-la-princesse-mathilde-en.html). Et elle est également depuis quelques années représentante spéciale d'Unicef et d'Onusida pour les enfants affectés par ce virus (interview de la princesse suite à son voyage au Liberia : http://familleroyalebelge.blogspot.com/2010/10/interview-de-la-princesse-mathilde-au.html).

Depuis 2007, la princesse Mathilde fait partie des Young Global Leaders et a participé, en mars 2011, pendant dix jours à leur forum à l'Université d'Harvard aux Etats-Unis (plus d'infos à ce sujet : http://familleroyalebelge.blogspot.com/2011/04/la-princesse-mathilde-harvard-mars-2011.html).

Présidente d'honneur d'Unicef-Belgique, la princesse accorde son Haut Patronage à Handicap International Belgique, SOS Villages d'Enfants-Belgique, l'Association de parents pour l'épanouissement des enfants autistes, l'ONG Plan Belgique, la Ligue Alzheimer, l'Association Françoise Dolto, la Ligue Belge de la Surdité, le centre pour enfants Les Glaïeuls, ainsi que l'asbl Les Amis du Théâtre Royal de la Monnaie.

En 2010, Mathilde est adoubée dame de grande-croix de l'Ordre Equestre du Saint-Sépulcre de Jérusalem, dont son défunt père, le Roi, la Reine et le prince Philippe étaient déjà membres. La princesse est aussi la marraine de la princesse Alexia des Pays-Bas et de la princesse Isabella de Danemark.

La princesse fait rarement des confidences aux journalistes. En 2009, elle confie à l'occasion de ses 10 ans de mariage : "Je me souviens du jour du mariage comme si c'était hier. J'ai rencontré des Belges merveilleux. Comme tout au long de ces dix années où j'ai vu des gens porter des projets très intéressants. Nous essayons de former un cocon chaleureux et structurant pour nos quatre enfants dynamiques qu'on adore énormément. Ces dix années ont également été marquées par la mort de mon père en 2008. Ce fut un moment très difficile mais j'ai pu compter sur ton soutien. Ce que j'apprécie le plus chez Philippe, c'est sa profondeur, son sens de l'engagement. Il est très engagé dans la famille. C'est un père de famille extrêmement présent, mais aussi très engagé dans sa fonction".

En 2010, elle parle des langues au magazine "Onze Taal" : "Petite, j'entendais ma mère parler polonais et parfois mon père néerlandais. Cela m'a donné le goût des langues. Philippe et moi voulons transmettre ce même goût à nos enfants. C'est un atout pour l'avenir et une ouverture vers une richesse culturelle. J'ai commencé à apprendre le néerlandais à 12 ans. Un peu tard peut-être, car c'est lorsqu'on est enfant qu'il faut apprendre une autre langue, et de manière ludique. Les trois dernières années de mes secondaires, nous avions un professeur fantastique. Il ne s'attardait pas uniquement sur l'aspect linguistique, mais apportait un côté culturel qui rendait ses cours captivants. Ce qui est plus difficile, ce sont les constructions de phrases, la prononciation de certains sons qui n'existent pas en français, les accents toniques qui ont beaucoup plus d'importance qu'en français. A la maison, le travail pour l'école se fait en néerlandais, sinon nous parlons le français. Entre eux, les enfants parlent les deux langues, parfois même en les mélangeant. En tant que parents, nous devons être attentifs à tout cela".

lundi 16 janvier 2012

Le rôle politique du roi Albert II en 2001

Le Roi se rend en janvier 2001 à l'hôpital Onze Lieve Vrouw d'Alost pour rendre hommage à la dépouille mortelle de Paul Van den Boeynants (81 ans) et présenter ses condoléances à sa famille. Cet administrateur de sociétés fut notamment député, président du PS, ministre de la Défense Nationale et premier ministre. Le roi Baudouin lui avait octroyé le titre de Ministre d'Etat. Paul Van den Boeynants était aussi entré dans l'Histoire pour son médiatique enlèvement par la bande Haemers en 1989.

Le 23 janvier, après une nuit de négociations, les représentants des différents gouvernements du pays aboutissent à un accord (dit de la St. Polycarpe) sur une nouvelle réforme de l'Etat. Grâce au soutien du PSC dans l'opposition, il recueille 2/3 des voix au parlement. Les Flamands obtiennent la régionalisation de l'agriculture, du commerce extérieur, de la loi communale et provinciale, de certains impôts (droits d'enregistrement, de donation de biens immobiliers, taxes de circulation, etc.). Les francophones décrochent l'adaptation du financement des communautés à l'évolution de la prospérité économique et sauvent ainsi la communauté française de la faillite annoncée depuis plusieurs années.

Bien entendu, le Roi était peu favorable à cette nouvelle étape dans le fédéralisme. D'après le livre "Roi et vice-roi" de Guy Polspoel et Pol Van den Driessche, un incident se serait produit à ce sujet en avril 2001 entre le premier ministre et le chef de cabinet du Roi Jacques van Ypersele de Strihou. Le souverain devait signer des documents sur la réforme de l'Etat pour qu'ils puissent être introduits au parlement dans les temps. Le gouvernement aurait appris avec surprise qu'il avait déjà quitté Bruxelles et qu'il devait embarquer peu après dans un avion militaire pour ses vacances de Pâques dans le sud de la France. Voulant à tout prix que les papiers soient signés à temps, Guy Verhofstadt aurait ordonné que l'appareil reste sur le tarmac. Il aurait accusé le chef de cabinet du Roi d'avoir usé d'une "manoeuvre de retardement".

En régionalisant la loi communale, les accords de la St. Polycarpe suppriment un des pouvoirs du souverain : la signature de l'acte de nomination des gouverneurs de nos 10 provinces et des bourgmestres de nos 589 communes. Ce rôle est rempli depuis 2002 par le ministre régional des Affaires intérieures. Malgré la suppression de l'Office Belge du Commerce Extérieur, Albert II réussit à obtenir la création d'une Agence Fédérale du Commerce Extérieur, qui aurait pour but d'organiser les missions économiques du prince héritier Philippe. Ce souhait du Roi rejoignait celui des hommes d'affaires belges, bien conscients que la présence du prince à la tête d'une délégation permettait d'ouvrir beaucoup plus de portes à l'étranger et d'avoir une couverture médiatique plus importante (d'autant que désormais, la populaire et glamour princesse Mathilde participait à certains voyages).

Entretemps, suite à la publication du manifeste "Le corps n'est pas une marchandise", le Roi consacre l'intégralité de son discours de Nouvel An 2001 à la traite des êtres humains :

"A propos de notre pays, le manifeste des parlementaires précise et je cite : "La Belgique reste, malgré les efforts de ces dernières années et une législation pilote en cette matière, une plaque tournante de la traite des femmes. Le constat est donc effrayant et laisse trop de gens indifférents. Nous le disons avec force et conviction : ce laisser-faire couvre une entreprise dégradante, un trafic déshonorant, un monde de violence et de cruauté". Fin de citation.

Quant aux raisons de ce phénomène, un rapport récent du parlement européen souligne que la prostitution, en règle générale, ne découle pas d'un choix de vie. Il s'agit en l'occurence d'un phénomène étroitement lié à des conditions de vie très défavorables.

Que peuvent faire la communauté internationale, l'Europe et la Belgique face à ce drame dont l'ampleur ne cesse d'augmenter? Il me paraît que seule une action concertée internationalement puisse faire régresser ce trafic. Cette action doit se porter d'une part sur les pays d'origine des victimes, d'autre part sur les pays occidentaux où ces personnes sont traitées comme des esclaves, et enfin sur les réseaux mafieux.

Il va de soi que dans les pays d'origine des victimes, les circonstances qui provoquent l'émigration méritent un traitement prioritaire. Ces circonstances sont variées : guerres, pauvreté extrême, perspectives d'avenir inexistantes. Ces pays, en accord avec la communauté internationale, doivent orienter les programmes de coopération en faveur des personnes les plus vulnérables. Ainsi la Fondation Roi Baudouin soutient dans différents pays des Balkans des projets destinés à aider et à procurer une formation aux enfants des rues. Par ailleurs, des campagnes d'information sont indispensables. Les candidats migrants doivent connaître les risques d'exploitation attachés à la migration illégale. L'Organisation Mondiale des Migrations s'y emploie utilement.

Dans les pays occidentaux, il y a lieu, comme le soulignent les auteurs du manifeste, de mettre en place un système préventif qui informe le client de sa complicité. Il est indispensable aussi d'aider les associations de terrain qui viennent en aide aux victimes. Dans notre pays, il s'agit notamment de Payoke, Pag-Asa, Sürya ou du Nid. D'autre part, le centre pour l'égalité des chances fait une utile évaluation annuelle de la traite des êtres humains en Belgique.

La lutte contre toutes les formes de traite doit devenir une priorité pour nous tous. Les conclusions du conseil européen de Tampere contiennent un mandat clair à ce sujet. Je me réjouis que la présidence suédoise de l'Union Européenne ait déjà proposé un programme d'action en cinq points à ce propos. Notre gouvernement aussi a décidé d'organiser pendant la présidence belge de l'Union Européenne une réunion spéciale consacrée aux problèmes de l'immigration. La traite des êtres humains y sera également à l'ordre du jour.

Mettons tout en oeuvre pour réinsérer ces victimes et pour leur proposer des alternatives concrètes. Luttons efficacement contre les mafias criminelles qui organisent ces trafics d'êtres humains, de drogue, d'armes et de blanchiment d'argent. Chez nous, il s'agit notamment de mafias albanaises qui, selon la commission du Sénat, se montrent particulièrement brutales et cruelles.

Le parlement européen demande aux Etats membres et aux pays candidats : d'établir une autorité centrale chargée de la lutte contre le commerce des êtres humains, de mettre en place ou de renforcer des unités de police spécialisées dans ces questions, d'améliorer la coopération entre pays d'origine, de transit, de destination, Europol et Interpol.

La Commission Européenne, enfin, devrait présenter des propositions concrètes visant à harmoniser les législations et méthodes nationales de détection et de poursuite. Elle a déjà actuellement développé le programme STOP, qui a pour but de former des responsables de la lutte contre la traite des êtres humains.

Je voudrais terminer par une réflexion plus personnelle. Il y a une dizaine d'années, un journaliste belge avait écrit une série d'articles sur le même sujet. Ils avaient fort ému mon frère le roi Baudouin qui, peu après, visita le centre Payoke à Anvers. A la même époque, une commission parlementaire avait été à la base d'une législation nouvelle, entrée en vigueur dans notre pays en avril 1995 et qui fut considérée alors comme une législation pilote.

Plus de cinq ans après, force nous est de constater que chez nous et en Europe, le problème s'est fortement aggravé. Par contre, nous sommes bien placés pour reprendre l'initiative et combattre résolument les esclavagistes des temps modernes. C'est un combat pour la dignité de la personne humaine. Pour ma part, je le fais par conviction personnelle et par fidélité à la mémoire de mon frère".

Selon l'ouvrage "Métier de Roi" de Pierre-Yves Monette (conseiller honoraire des rois Baudouin et Albert II), le Roi aurait insisté auprès de Guy Verhofstadt pour que la traite des êtres humains soit reprise parmi les 16 priorités du gouvernement belge lors de la présidence de l'Union Européenne du 1er juillet au 31 décembre 2001. Ce qui fut fait.

Début juillet, le Roi, la Reine, le président de la Commission Européenne Romano Prodi et le premier ministre Guy Verhofstadt assistent à un spectacle de danse de la troupe belge Rosas au Théâtre Royal de la Monnaie, organisé pour le début de la présidence belge de l'Union Européenne. Albert II consacre l'intégralité de son discours de la fête nationale 2001 à la construction européenne et aux objectifs européens de notre gouvernement fédéral pour les six prochains mois.

Le 11 septembre, plusieurs avions sont détournés aux Etats-Unis par des terroristes et foncent dans les tours jumelles du World Trade Center à New York, ainsi qu'au Ministère de la Défense (le Pentagone) à Washington. Ces attentats causent la mort de plusieurs milliers de personnes et choquent le monde entier. Quelques heures plus tard, le Palais annonce : "Le Roi exprime son horreur, son profond chagrin et adresse sa sympathie aux familles des victimes". Le porte-parole ajoute que le souverain avait envoyé un télégramme au président George W. Bush, et que le prince Laurent, en mission aux USA avec le ministre-président de la région bruxelloise François-Xavier de Donnéa, était hors de danger à Boston.

Le lendemain, la famille royale fait un triple hommage aux victimes. Le roi Albert et la reine Paola reçoivent en audience l'ambassadeur des Etats-Unis Stephen Bauer et son épouse. En mission économique au Maroc, le prince héritier exprime sa compassion et sa tristesse lors d'une conférence de presse. Le prince Laurent assiste à une cérémonie religieuse à la cathédrale de Boston. Le 15 septembre, le prince Philippe et la princesse Mathilde sont présents à la messe d'hommage à la cathédrale Saints-Michel-et-Gudule à Bruxelles.

Afin d'apporter sa contribution personnelle au civisme fédéral qu'il prône dans ses discours, le Roi décide en 2001 de supprimer l'attribution de titres dynastiques (comte du Hainaut, prince de Liège et comte de Flandre) à des membres de la famille royale. Si on avait respecté la tradition, la princesse Elisabeth (premier enfant successible du prince héritier) aurait dû être comtesse de Hainaut. Il n'en fut rien. En accord avec le gouvernement, Albert II estimait qu'Elisabeth était la princesse de tous les Belges, et pas uniquement d'une province. Cela ne correspondait plus à la volonté de la famille royale d'être au-dessus des communautés linguistiques et de maintenir la cohésion de la Belgique fédérale. Par contre, le prince Philippe reste duc de Brabant, car il y a un Brabant flamand et un Brabant wallon...

Le 7 novembre, le Tribunal de Commerce de Bruxelles déclare la faillite de notre compagnie aérienne, la Sabena, qui emploie 10.000 personnes. Aussitôt Maurice Lippens et Etienne Davignon décident de lui trouver un successeur, avec le soutien du Roi et du premier ministre Guy Verhofstadt. Grâce à leur imposant carnet d'adresses, ils partent à la recherche de capitaux pour une mission presque impossible. Probablement que Jacques van Ypersele de Strihou donne également de nombreux coups de téléphone. Certains journalistes évoquent une "mission royale", mais les deux compères répondent que le devoir patriotique est leur seule motivation.

Dans son discours de Noël 2001, Albert II évoque la faillite de la Sabena : "Je songe avec émotion aux milliers de personnes qui ont perdu récemment leur emploi, éprouvant désarroi et tristesse. Puissent-elles, en cette trêve de Noël, retrouver force et courage. Je tiens par ailleurs à féliciter chaleureusement tous ceux qui dans un esprit de solidarité s'efforcent de créer des emplois nouveaux ou de préserver des emplois menacés, notamment dans le transport aérien".

Maurice Lippens et Etienne Davignon réussissent à lancer début 2002 une nouvelle compagnie aux ambitions plus restreintes : la SN Brussels Airlines. En remerciement, Etienne Davignon reçoit en 2004 le titre honorifique de Ministre d'Etat.

Entretemps, vu que les partis sociaux-chrétiens sont désormais dans l'opposition, le gouvernement Verhofstadt Ier décide de marquer la séparation entre l'Eglise et l'Etat lors de la fête du Roi 2001.

Premier changement : le Te Deum perd son caractère officiel. Ce n'est plus le ministre de l'Intérieur, mais les autorités religieuses qui invitent à la célébration. Des détachements militaires ne sont plus présents à la cathédrale Saints-Michel-et-Gudule. Les enfants du Roi y assistent en civil et plus en uniforme militaire.

Seconde modification : en fin d'après-midi, une réception est organisée pour 600 personnes (la famille royale, les autorités politiques, religieuses, judiciaires et militaires du pays, ainsi que des citoyens choisis par les gouverneurs de province), au cours de laquelle le premier ministre, les présidents de la Chambre et du Sénat prononcent un discours.

Contrairement aux baptêmes de Philippe, Astrid et Laurent dans les années 60, celui de la princesse Elisabeth est considéré comme un événement privé et non officiel. La cérémonie se déroule dans l'intimité de la petite chapelle du domaine de Ciergnon, restaurée à l'initiative de la reine Paola. La famille royale, les comtes d'Udekem d'Acoz, le grand-duc Jean et la grande-duchesse Joséphine-Charlotte de Luxembourg assistent au baptême célébré par le cardinal Danneels. A la demande de la presse, un caméraman et un photographe ont pu immortaliser quelques instants de la messe. Tous les petits-enfants du couple royal ont eu droit à un baptême privé, contrairement aux autres monarchies européennes où l'événement est dignement fêté.

En 2001, les journalistes flamands Guy Polspoel et Pol Van den Driessche sortent leur livre "Roi et vice-roi : l'influence de la Cour et le pouvoir de Jacques van Ypersele de Strihou". Sans nier les qualités du chef de cabinet des rois Baudouin et Albert II et les grands services qu'il a rendus à la monarchie, les auteurs souhaitaient convaincre les lecteurs (et le monde politique...) que Jacques van Ypersele de Strihou était depuis trop longtemps le bras droit du chef de l'Etat. Ils étaient confortés par une déclaration du vice-premier ministre Johan Van de Lanotte ("Aucune fonction ne peut durer éternellement, pas même celle de chef de cabinet du Roi") et la réaction embarrassée du premier ministre ("Ce qu'il dit me paraît tout à fait évident, mais je ne veux rien ajouter à ce sujet"). Le gouvernement fédéral n'intervient, en effet, pas dans la nomination des collaborateurs du souverain et Guy Verhofstadt ne souhaitait pas changer cette pratique. Dans leur ouvrage, les deux auteurs suggéraient même une proposition de date pour la retraite de Jacques van Ypersele de Strihou : le 5 décembre 2001, jour de son 65ème anniversaire.

Le Roi ne s'est pas laissé influencer par les deux journalistes et son chef de cabinet a pu fêter en 2003 ses vingt années de service au Palais... Remarquons que cette longévité n'est pas respectée pour le Grand Maréchal de la Cour : Gérard Jacques (de 1993 à 1994), Lucien Buysse (de 1994 à 1997), Jan Willems (de 1997 à 2001) et Frank De Coninck (de 2002 à 2006) se sont succédés à ce poste.

Pour le sommet clôturant la présidence belge de l'Union Européenne en décembre 2001, le Roi met le château et les serres de Laeken à la disposition du gouvernement Verhofstadt Ier. C'est dans ce cadre prestigieux que se tiennent les réunions des chefs d'Etat et de gouvernement des quinze pays. Albert II les reçoit à déjeuner le premier jour du sommet et a ensuite plusieurs entretiens bilatéraux.

Dans son discours de Noël, il évoque la situation internationale : "Je ne puis m'empêcher de penser aux victimes des attentats du 11 septembre et à leurs familles si cruellement éprouvées. Comme j'ai pu le dire à ce moment à l'ambassadeur des Etats-Unis, de tels actes barbares, tuant plusieurs milliers d'innocents, constituent des attaques contre la démocratie et nous partageons la douleur de l'Amérique devant un crime que rien ne peut justifier.

A la suite de cette tragédie, une large coalition internationale s'est forgée contre le terrorisme. Nous souhaitons qu'une telle solidarité puisse se maintenir pour lutter plus efficacement encore contre d'autres menaces et injustices dans le monde. Je pense en particulier à la situation démocratique au Moyen-Orient. Elle forme comme une espèce de terreau, où la haine et la violence peuvent se développer en abondance. Je pense aussi aux souffrances des populations en Afrique centrale, touchées par la guerre civile et le cortège de privations et de maladies qu'elle entraîne avec elle. Je pense également au milliard de personnes qui souffrent de la faim dans le monde et à tous ceux qui en meurent. Je pense encore à cette nouvelle forme d'esclavage qu'est la traite des êtres humains.

Pour faire face à ces situations inacceptables, de vastes coalitions internationales sont indispensables. Pendant la présidence belge de l'Union Européenne, notre pays s'est courageusement efforcé avec ses partenaires de lutter contre ces différentes sources d'injustice, réagissant ainsi à l'égoïsme, au matérialisme et à la peur de l'autre. Je me réjouis aussi qu'au sommet de Laeken, des progrès aient été réalisés pour mieux définir l'image de notre future Union Européenne".

Et il termine ce discours de Noël en désignant son combat le plus important en tant que roi des Belges : "Pour conclure, je voudrais en cette période si propice demander à chacun d'être attentif en permanence à la préoccupation suivante : comment puis-je mieux encore être utile aux autres? Quant à moi, c'est avec cet objectif de service au pays que je poursuivrai ma tâche, dont la priorité est d'encourager son indispensable cohésion. Cette union dans le respect de la diversité est d'ailleurs clairement souhaitée par la très grande majorité des Belges".

Le 30 décembre 2001, une cérémonie marquant le futur passage à l'euro et le changement de pays président de l'Union Européenne a lieu au palais royal de Bruxelles en présence du roi Albert, du prince héritier Philippe, du roi Juan Carlos d'Espagne, du président de la Commission Européenne Romano Prodi, du premier ministre espagnol José Maria Aznar et du gouvernement belge.

lundi 9 janvier 2012

"Marie-Henriette, reine des Belges : la lionne blessée" (Jo Gérard)

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Née le 23 août 1836, Marie-Henriette est la fille de l'archiduc Joseph d'Autriche, palatin de Hongrie, et de Marie-Dorothée de Wurtemberg. Elle passe une enfance heureuse en Hongrie, loin du protocole de la Cour de Vienne. A 16 ans, elle participe, pour la première fois, à un bal de la Cour.

Afin de préserver l'indépendance de la Belgique face à l'impérialisme français de Napoléon III, le roi Léopold Ier imagine un mariage politique entre le prince héritier Léopold, duc de Brabant et l'archiduchesse Marie-Henriette d'Autriche. La reine Victoria d'Angleterre trouve cette union prématurée et incite en vain son oncle à le reporter d'un an. Après l'accord de l'empereur François-Joseph, Marie-Henriette quitte avec regret sa famille en août 1853 pour prendre la direction de la Belgique.

Mais le courant ne passe pas entre les jeunes époux. Contrairement à son mari, Marie-Henriette aime l'équitation, la peinture, la musique et la littérature. On parle de "l'union d'un palefrenier et d'une religieuse, étant entendu que la religieuse est le duc de Brabant". En octobre, ils se rendent chez la reine Victoria qui constate leurs différences et pense que leur mariage n'a pas encore été consumé.

Préoccupé par la situation du jeune couple, le roi Léopold Ier leur offre un long voyage en Orient de novembre 1854 à août 1855. Ils visitent notamment Vienne, Venise, Trieste, Corfou, Alexandrie, Le Caire, Jérusalem, Beyrouth, Damas, la Crête, Rhodes, Athènes, la Sicile, le Vatican et la Suisse. Ce voyage s'avère positif pour le couple qui s'est un peu rapproché.

En 1865, Léopold Ier meurt, la main dans celle de sa belle-fille Marie-Henriette qui devient reine des Belges. L'année suivante, le nouveau couple royal effectue des Joyeuses Entrées à Gand, Bruges, Ostende, Mons, Tournai, Liège, Charleroi et Namur.

L'auteur Jo Gérard compare Marie-Henriette à Louise-Marie : "Ce qui rapproche les deux premières souveraines? L'échec de leur vie sentimentale et, osons le mot, sexuelle. Louise-Marie ne le dissimule pas dans une lettre pathétique qu'à la fin de son existence elle adressera à son mari. Celui-ci, comme Léopold II plus tard, entendra bien limiter le rôle officiel de sa femme. Il ne cherchera jamais à lui confier d'importantes missions politiques ou diplomatiques. Nos deux premiers rois ne feront pas de leurs épouses de véritables collaboratrices, ainsi qu'on le verra au temps d'Albert Ier pourvu, il est vrai, d'une femme douée d'une forte et originale personnalité".

Fille de Léopold II et de la princesse Marie-Henriette, la princesse Stéphanie écrira plus tard : "Mes parents ne se sont pas compris. Leurs chemins se sont croisés un seul instant, pour s'écarter aussitôt et à jamais. Il choisit celui de l'indifférence et de l'infidélité ; elle dut accepter celui de la résignation, de la solitude et de la douleur".

Outre des actions de charité, la reine Marie-Henriette part chercher à Miramar en 1867 sa belle-soeur Charlotte, éphémère impératrice du Mexique, et soigne des blessés au palais royal durant la guerre franco-prusienne de 1870. Elle a la douleur de perdre son fils Léopold, victime d'une pneumonie suite à une chute dans un étang à Laeken.

A partir de 1895, elle fuit la Cour, laissant le rôle de Première Dame à sa fille cadette la princesse Clémentine, et s'installe à Spa où elle se plaît beaucoup et décède en 1902.

Jo Gérard est un bon conteur mais il a le défaut de s'étendre sur des sujets historiques qui n'ont rien à voir avec le sujet du livre. J'aurais préféré qu'il explore un peu plus la personnalité et la correspondance de la reine Marie-Henriette.

lundi 2 janvier 2012

Le rôle politique du roi Albert II en 2000

Lors de la réception de Nouvel An 2000 aux autorités du pays, Albert II apporte son soutien public à l'action de "son" ministre des Affaires Etrangères Louis Michel. Il apparait clairement que les deux hommes sont sur la même longueur d'onde :

"Aujourd'hui, j'aimerais vous parler d'un sujet qui figure en bonne place dans la déclaration gouvernementale. C'est un sujet qui me tient fort à coeur depuis longtemps et qui intéresse particulièrement le prince Philippe : il s'agit de l'image de la Belgique.

Est-ce important? Bien sûr, et ce pour deux raisons au moins. La première relève du domaine humain. En effet, s'il est naturel de tenir au bon renom de sa famille, il est normal aussi de souhaiter que son pays soit estimé et apprécié. Chaque citoyen se réjouit lorsqu'il a des raisons d'être fier de son pays. A l'évidence, cette fierté ne doit pas dégénérer en nationalisme extrême. La deuxième raison relève du domaine économique. Une image favorable assure de multiples avantages à un pays exportateur comme la Belgique. Elle stimule le dynamisme de ses entreprises, accroît ses échanges, procure de l'emploi à ses habitants, bref, elle contribue à sa prospérité.

Malheureusement, diverses crises ont nui à notre bonne réputation. Comment y remédions-nous? Essentiellement en mettant l'accent non pas d'abord sur des techniques de relations publiques, mais bien sur des mesures propres à éliminer ces crises. C'est pourquoi je me réjouis des actions entreprises par le gouvernement pour améliorer le fonctionnement de nos services de sécurité et de la justice. C'est une oeuvre de longue haleine et je demande à nouveau à tous les responsables de s'investir pleinement pour faire réussir ces réformes. Dans le domaine spécifique de la disparition et la maltraitance d'enfants, de nombreuses mesures ont déjà été prises et la création de Child Focus en constitue un exemple fort apprécié, ici comme à l'étranger. C'est une preuve de notre capacité de réaction face à des situations inacceptables.

En ce qui concerne la santé des consommateurs, le gouvernement a décidé d'unifier les services de contrôle du ministère de la Santé et du ministère de l'Agriculture. La création de l'Agence Fédérale pour la Sécurité de la Chaîne Alimentaire est une étape importante. Il convient maintenant de mettre ce nouvel organisme en place et de le faire fonctionner efficacement.

Mais nous ne devons pas nous contenter de réagir aux crises. Engageons-nous résolument dans la modernisation de notre pays et de son service public qui doit être à même de mieux répondre aux demandes et aux besoins des citoyens. Nous atteindrons cette bonne organisation interne par la mise en oeuvre des techniques les plus modernes et en encourageant la dépolitisation de l'administration ainsi que la formation permanente des fonctionnaires. Sur le plan économique et social, montrons que notre pays veut combattre la pauvreté et la marginalisation par le développement de l'état social actif qui investit dans la formation et l'emploi.

Examions à présent quelques caractères spécifiques de notre pays. Un de nos atouts réside dans notre situation au confluent des deux grandes cultures europénnes : la culture germanique et la culture latine. Il est important de présenter notre pays comme un Etat fédéral moderne, où l'identité propre de chaque identité peut s'épanouir. Notre société multiculturelle favorise l'ouverture à l'autre et la capacité de le comprendre, ce qui constitue un autre avantage. Le multilinguisme et l'esprit de tolérance sont également deux qualités fort appréciées et qu'il faudrait développer encore davantage (...)

Mais l'image de marque d'un pays ne dépend pas seulement de sa bonne organisation interne. Elle est la résultante d'un grand nombre de facteurs très différents qu'il convient de stimuler ou de mettre en valeur : la recherche scientifique, le patrimoine culturel, les technologies spécifiques, les équipements et j'en passe. Cette image se forge aussi au quotidien par les premières impressions qu'un étranger recueille aux portes d'entrée de notre pays : nos aéroports, nos gares, nos ports, nos autoroutes. Cette première impression influence souvent son jugement définitif. Soyons donc attentifs à réserver un accueil bienveillant et de qualité, non seulement aux hommes d'affaires, mais aussi aux touristes et aux nombreux journalistes qui suivent chez nous les activités de l'Union Européenne et de l'Otan.

La réflexion et l'action dans ces domaines devraient faire l'objet d'un large consensus entre autorités fédérales et régionales, entre secteur public et privé et entre partenaires sociaux".

Si la Constitution belge de 1994 interdit au souverain d'intervenir dans la composition des gouvernements régionaux et communautaires et de signer leurs décrets, le Roi conserve beaucoup d'intérêt pour les projets des entités fédérées et reçoit régulièrement les ministres régionaux et communautaires en audience. C'est dans cet esprit qu'il se rend en mars 2000 à Namur pour une réunion de travail avec le gouvernement wallon (PS/MR/Ecolo) au sujet du Contrat d'Avenir pour la Wallonie. Au terme de celle-ci, le ministre-président lui remet une version de luxe, reliée en cuir. Devant la presse, le Roi lui répond : "C'est un travail magnifique. Il se retrouvera sur mon bureau et c'est avec beaucoup d'intérêt que je suivrai les progrès effectués par la Wallonie".

Lors de son discours de la fête nationale 2000, Albert II salue avec joie la paix communautaire qui s'était installée depuis les élections de juin 1999 : "Chez nous, la monarchie est à la fois un symbole mais aussi un acteur de l'unité nationale. Il est important que la personnalité propre de chacune de nos communautés et de nos régions puisse s'épanouir pleinement. Mais soyons conscients aussi de ce qui nous unit et favorisons cette unité. Comme je l'ai déjà dit souvent, la diversité dans notre pays est notre richesse. Notre devise nationale, "L'union fait la force", garde toute sa valeur. D'ailleurs, fédérer signifie unir et unir est une des tâches de la monarchie belge. Je continuerai donc à m'y employer activement.

Il y a quelques mois, les institutions européennes ont choisi comme devise "L'unité dans la diversité". Nous sommes bien placés pour ouvrir la voie dans cette direction et pour jouer un rôle moteur sur ce chemin. Mais pour bénéficier pleinement de l'atout que constitue la diversité, il est nécessaire que chacun de nous connaisse l'autre le mieux possible. Cela suppose la connaissance de sa langue, de sa culture, de sa mentalité et de ses qualités.

L'échange harmonieux avec l'autre doit contribuer à une créativité accrue et favoriser une image positive de la Belgique. Cette perception avantageuse de notre pays se trouve également renforcée par certaines actions comme la coorganisation réussie de l'Euro 2000 en dépit du comportement déplorable des hooligans, heureusement vite maîtrisés par nos forces de l'ordre. Sur un plan culturel, le rayonnement des manifestations de Bruxelles 2000 et de la commémoration du 500ème anniversaire de la naissance de Charles-Quint nous est aussi très bénéfique. Par ailleurs, il me semble bien que la collaboration entre nos communautés, nos régions et l'Etat fédéral se soit améliorée ces derniers temps. Cela rejaillit automatiquement sur l'opinion que nous nous formons de nous-mêmes, aussi bien que sur notre image à l'extérieur. J'ai pu m'en rendre compte à l'occasion de mes contacts avec plusieurs chefs d'Etat.

D'autre part, il va de soi qu'en évitant des tensions entre communautés, nous disposons d'une énergie supplémentaire pour résoudre les questions qui préoccupent directement les citoyens : la sécurité, la qualité de notre environnement, la mobilité, la formation et l'emploi, la modernisation de notre administration, l'avenir des pensions et la diminution de la charge fiscale. Grâce aux efforts d'assainissement de nos finances publiques, poursuivis depuis de nombreuses années sous des gouvernements successifs, nous disposons maintenant de plus de moyens pour rencontrer ces besoins".

Les Belges se rendent aux urnes le 8 octobre 2000 pour renouveler les conseils communaux et provinciaux. Tant au nord qu'au sud du pays, les résultats sont positifs pour toutes les composantes du gouvernement Verhofstadt Ier au détriment des sociaux-chrétiens. Deux jours plus tard, le secrétaire d'Etat au Commerce Extérieur Pierre Chevalier remet sa démission au Roi, car il allait être entendu dans une affaire d'escroquerie et ne voulait pas entacher le gouvernement fédéral. Annemie Neyts lui succède et accompagne le prince Philippe dans ses missions économiques entre 2000 et 2003.

Afin de faire taire les rumeurs d'abdication suite à ses deux hospitalisations successives, le Roi effectue, avec la reine Paola, plusieurs déplacements officiels à l'étranger durant l'automne 2000 : visite de l'Exposition Universelle de Hanovre (Allemagne), passation de pouvoir entre le grand-duc Jean de Luxembourg et le grand-duc héritier Henri, voyages d'Etat en Tchéquie et en Suisse, funérailles de la reine mère Ingrid de Danemark. En compagnie du ministre de la Défense André Flahaut, notre souverain se rend dans les Balkans, afin de soutenir les militaires belges qui y étaient déployés.

Ce dernier voyage inspire Albert II pour son discours de Noël 2000 :

"Je voudrais dire à nos militaires qui passent cette fête de Noël là-bas, loin de leur foyer, que nos pensées chaleureuses vont vers eux et vers leurs courageuses familles. Nous sommes fiers du travail qu'ils accomplissent dans des conditions parfois très difficiles et dangereuses pour que la paix règne dans cette région troublée d'Europe. Ils contribuent à cette paix non seulement par leur présence armée, mais aussi en travaillant à des projets de développement et en nouant ainsi des liens avec la population civile. Je m'en suis bien rendu compte sur place.

J'aimerais associer à cet hommage tous ceux et toutes celles qui, par le passé, ont déjà participé à de telles missions au Kosovo, en Bosnie, en Slavonie orientale, en Afrique ou ailleurs dans le monde. Je pense aussi aux compatriotes qui exercent au Kosovo des responsabilités civiles dans le cadre des Nations Unies, de l'Union Européenne, de l'Organisation pour la Sécurité et la Coopération en Europe ou au sein d'organisations non gouvernementales. Ils font là-bas un travail formidable et je les en remercie. J'ai également pu constater avec intérêt que la communauté internationale a confié à l'Eurocorps, cet embryon d'armée européenne, des responsabilités importantes. Durant six mois, il a assuré avec succès la conduite effective de la force de paix multinationale au Kosovo. C'est ainsi que se construit sur le terrain l'Europe de la défense et il est heureux que notre pays y participe activement.

Quand on parcourt ces régions des Balkans, on est horrifié par les ravages causés encore à notre époque et sur notre continent par le nationalisme extrême et par la xénophobie. Cela nous incite vraiment à rester attentifs à toute forme de racisme ou d'exaltation démesurée de l'identité propre. Souvenons-nous des leçons du passé et n'oublions pas celles des Balkans aujourd'hui".

Dans son discours, il évoque aussi la famille : "Une enquête récente réalisée auprès des Belges, mais aussi auprès d'autres citoyens européens, montre que la famille est et reste pour eux la principale valeur. 96% de nos compatriotes la placent au tout premier rang des domaines qui sont importants dans leur vie. Elle est le lieu privilégié de leur épanouissement. En cette période de l'année, chacun a des attentions spéciales pour les autres membres de sa famille. Mais cette générosité ne peut pas se limiter au cercle de nos proches. Pensons également à ceux et à celles autour de nous qui sont privées de ces liens familiaux, et qui vivent dans un isolement souvent dur à porter. Evitons le repli sur soi qui conduit trop facilement à l'individualisme, une tendance et un danger bien réels que l'enquête dont je vous parlais met clairement en lumière".