La lecture des premiers chapitres démontre que l'enfance du prince (né en 1963) n'a pas été heureuse suite aux problèmes conjugaux et aux absences de ses parents, à la naissance de sa demi-soeur Delphine (qui voyait leur père plus souvent que lui), à sa position difficile de cadet (négligé par rapport à Philippe, le futur roi), à sa méconnaissance du néerlandais et aux choix peu judicieux du Palais (pourquoi l'envoyer à la Marine alors qu'il a le mal de mer?). Tout cela explique en grande partie son caractère rebelle et son parcours scolaire qui aura été un chemin de croix entre le collège Saint-Michel d'Etterbeek, l'école abbatiale de Zevenkerken, l'Institut Pie X à Anvers, l'Ecole Royale des Cadets et l'Ecole Royale Militaire. Seul un enseignement personnalisé avec Rudy Bogaert porte ses fruits et lui permet d'obtenir le diplôme de l'enseignement secondaire devant le jury central.
Mario Danneels révèle que Laurent a été inscrit à l'université franciscaine de Steubenville (Ohio), une haute école catholique proche du Renouveau Charismatique, probablement après l'été 1984 (le Palais n'a pas voulu confirmer). Mais contrairement à ce qu'espère sa famille, il n'y adhère pas. L'enquête minutieuse de l'auteur démontre aussi que les stages guère réussis du prince au début des années 90 aux Etats-Unis...avaient pour objectif principal de le tenir éloigné de la Belgique pendant que son oncle le roi Baudouin le relègue loin du trône en faisant supprimer la loi salique dans l'ordre de succession. Laurent en est profondément blessé.
Chassé du Belvédère et de Laeken, il trouve refuge chez la famille Solvay à La Hulpe et s'attache à Marie-Claude Solvay, une "mère de substitution", dont il est toujours très proche : elle sera son témoin de mariage, la marraine de sa fille et administratrice de la Fondation Prince Laurent ; c'est chez elle que Louise a été baptisée par le père Guy Gilbert ; ils sont partis avec elle en vacances à Boston durant l'été 2012.
Mario Danneels conclut : "Durant les trente premières années de sa vie, le prince Laurent fut perpétuellement tiraillé par la dualité de sa condition. En dépit du manque d'amour familial, une armée de personnel était d'une part prête à satisfaire ses moindres caprices, tandis que d'autre part, dans le triste monde extérieur des internats et des salles de cours, il était raillé et exclu précisément en raison de son origine. Il en a développé une image du monde, irréaliste, et s'est accroché à ce qui lui procurait sécurité et considération, du moins à l'intérieur du Palais : son titre. Laurent était devenu quelqu'un qui se prévalait volontiers de ses prérogatives royales, exigeait d'être appelé Monseigneur en toutes circonstances, et allait développer un caractère arrogant et grossier".
Suite à l'accession au trône de son père en 1993, le prince Laurent sort de l'ombre et multiplie les initiatives : première interview en 1993, création de l'IRGT (dont il est le président) à la demande du Palais en 1994, installation à la Villa Clémentine (construite pour lui par la Donation Royale) en 1994, création de la Fondation Prince Laurent en 1995, publication du livre "Suivez le chien dans l'art et la ville" en 1996, ouverture du premier dispensaire pour soigner les animaux des personnes défavorisées en 1996, prestation de serment comme sénateur de droit en 2000, etc. Le témoignage de l'ancienne ministre Vera Dua démontre qu'il avait de bons contacts à cette époque avec le monde politique. Mario Dannels fait remarquer : "Conjuguée avec les initiatives sympathiques de la Fondation Prince Laurent, et son amour ostentatoire des bêtes, qui paraissait toucher la corde sensible de nombreux Belges, l'offensive médiatique de Laurent ne lui procura pas qu'une plate-forme, mais aussi une énorme popularité. Au milieu des années 90, il ne rivalisait dans les sondages qu'avec son père le Roi".
Malgré les erreurs du passé, la reine Paola se soucie de son fils cadet : elle lui fait rencontrer le père Guy Gilbert, Laurent la convainc de ne plus porter de fourrure, elle l'accompagne lors de certaines activités officielles, elle est le seul membre de la famille royale à lui rendre visite lorsqu'il est hospitalisé en 1999 pour dépression et surmenage. Laurent comble cette absence de vie de famille en s'entourant de gens plus âgés : Jean Bastien, Marie-Claude Solvay, Raymond Antoine ("mon père spirituel", dit-il), Jeanine Delruelle, Rik Van Aerschot, Herman De Croo, p.ex.
Après ses relations avec Diane de Schaetzen (de 1993 à 1995) et Wendy Van Wanten (de 1995 à 1999), le prince rencontre la géomètre Claire Coombs chez des amis en 2000. Ils se marient trois ans plus tard au cours d'une cérémonie marquée par la méditation du père Guy Gilbert. Des rumeurs d'infidélité circulent, mais l'union d'un tempérament fougueux italien et du flegme britannique tient bon. Pas impressionnée par les fastes de la Cour, Claire arrête de travailler pour élever leurs trois enfants, mais elle reste actionnaire de la société et souhaite reprendre plus tard son boulot.
La reine Paola ne cache pas sa grande sympathie pour sa belle-fille qui joue le rôle de médiatrice entre Laurent et ses parents. Mario Danneels fait remarquer : "Entre le prince et le pays d'origine de la Reine, c'est une véritable histoire d'amour, et il est plus italien que belge à bien des égards. Au niveau de sa personnalité, de son caractère et de son tempérament, il est une copie conforme de Paola, et en est conscient". Si ses relations avec ses parents, son frère et sa soeur ne sont pas faciles, le prince n'hésite pas à fréquenter la "branche d'Argenteuil" (Lilian, Alexandre, Léa et Marie-Esméralda) et à poser publiquement avec Delphine Boël et Isabelle Wybo, respectivement filles illégitimes d'Albert II et du prince-régent Charles.
L'auteur revient sur le procès d'Hasselt en 2007 au cours duquel le prince fut entendu comme témoin. Il a choisi de ne pas reprendre dans sa biographie les nombreux ragots invérifiables racontés par son ancien conseiller Noël Vaessen. Et conclut : "Laurent savait effectivement que l'argent des travaux de rénovation venait de la Marine mais ignorait qu'on procédait à des fraudes massives".
Par contre, l'enquête minutieuse de Mario Danneels sur les projets non conclus en Libye, l'achat de la villa à Panarea en Sicile, les fréquentations douteuses du prince, les structures complexes de la GRECT, de la Compagnie des Eoliennes et de Cerbux Invest, son voyage soi-disant privé au Congo et en Angola en 2011 pose de nombreuses questions déontologiques... Veut-il garder son rôle de prince de Belgique (et sa dotation) ou se lancer dans les affaires? L'auteur fait cependant remarquer : "Malgré toutes les tentatives supposées et les voyages dans de lointains pays exotiques derrière lesquels on peut subodorer au moins une tendance commerciale, il ne semble pas que Laurent se soit effectivement enrichi ou bien, n'en déplaise aux mauvaises langues, qu'il soit encore en état de s'enrichir".
Bravo à Mario Danneels pour cette biographie sérieuse, bien documentée et objective sur le prince Laurent qui cherche toujours sa place au sein de la famille royale et n'a pas réussi à surmonter les blessures de son enfance. Ses provocations traduisent un besoin de reconnaissance par le Roi et la société. Seuls la princesse Claire et leurs trois enfants lui ont apporté un peu de sérénité dans sa vie.
lundi 7 janvier 2013
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Merci Petit Belge pour cet article bien intéressant! Il me permet de savoir plus sur ce prince, controversé, mais que je trouve aussi attachant.
RépondreSupprimerOui, merci de nous parler, inlassablement, de notre famille royale qui, finalement, a ses soucis comme toutes les familles et les surmonte dignement!
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