Lors de leur audience hebdomadaire, le Roi a parlé au premier ministre de son envie d'abdiquer, et ce dernier lui a suggéré de prendre un temps de réflexion avant de prendre sa décision. Ce mercredi 3 juillet au matin, il a fait parvenir cette lettre (rendue publique en fin de soirée) à Elio Di Rupo :
"Monsieur le Premier Ministre,
Je reviens vers vous dans le prolongement de nos entretiens, après un temps de réflexion que vous m'avez suggéré de prendre. Durant cette période, j'ai prêté la plus grande attention aux considérations légitimes que vous m'avez exposées à l'occasion de nos échanges. C'est avec regret mais aussi en âme et conscience que je vous confirme, par la présente lettre, la teneur du message dont je vous avais fait part. Je me dois, en effet, de constater que ma santé ne me permet plus d'exercer ma fonction comme je le voudrais. Je suis profondément convaincu que ce serait manquer à mes devoirs et à ma conception de la fonction royale que de vouloir me maintenir en exercice à tout prix, sans être en mesure d'assumer pleinement mon rôle. C'est une question élémentaire de respect envers les institutions et envers les citoyens. Je constate aussi que le prince Philippe est bien préparé pour me succéder. Après 20 ans de règne et vu mon état de santé, j'estime que le moment est venu de passer le flambeau à la génération suivante. Le prince Philippe et la princesse Mathilde jouissent de toute ma confiance. C'est donc avec sérénité et confiance que je vous réaffirme mon souhait d'abdiquer ce 21 juillet 2013, jour de notre fête nationale, en faveur du prince héritier, mon fils Philippe. Aussi, Monsieur le Premier Ministre, avec votre accord et selon les modalités qui vous conviennent, j'aimerais pouvoir en informer les membres du conseil ministériel restreint directement et en personne. Votre dévoué Albert".
Aux environs de midi, dans la plus grande discrétion, le Roi reçoit dans son bureau du palais royal de Bruxelles le premier ministre Elio Di Rupo et les six vice-premiers ministres représentant chacun des six partis formant le gouvernement belge (Johan Van de Lanotte, Pieter De Crem, Alexander De Croo, Laurette Onkelinx, Joëlle Milquet et Didier Reynders). Très ému, il leur explique sa décision et leur confie sa fatigue. Quelques instants plus tard, le Palais annonce officiellement une allocution royale à 18h.
Au cours de l'après-midi, la reine Paola rejoint son époux pour assister en coulisses à l'enregistrement de son discours pour les chaînes de télévision et les radios. Jacques van Ypersele de Strihou, chef de cabinet d'Albert II au cours de ses 20 ans de règne, était également présent (à l'arrière-plan derrière la Reine sur la photo ci-dessous).
Contrairement à son habitude, le Roi est debout (et non assis) et n'utilise pas de prompteur, ce qui donne une touche plus naturelle à son allocution. L'enregistrement a lieu dans son bureau du rez-de-chaussée du palais royal de Bruxelles. A l'arrière-plan, on peut voir un tableau de Léopold Ier, le fondateur de la dynastie belge, qui a prêté serment....le 21 juillet 1831. Tout un symbole!
Voici le texte intégral de son discours télévisé et radiophonique :
"C'est avec émotion que je m'adresse à chacune et chacun d'entre vous aujourd'hui. Je suis entré dans ma 80ème année, un âge encore jamais atteint par mes prédécesseurs dans l'exercice de leur fonction. Je constate que mon âge et ma santé ne me permettent plus d'exercer ma fonction, comme je le voudrais. Ce serait manquer à mes devoirs et à ma conception de la fonction royale que de vouloir me maintenir en exercice à tout prix, sans être en mesure d'assumer pleinement mon rôle. C'est une question élémentaire de respect envers les institutions et envers vous, chers concitoyens.
Après 20 ans de règne, j'estime donc que le moment est venu de passer le flambeau à la génération suivante. Je constate que le prince Philippe est bien préparé pour me succéder. Il jouit avec la princesse Mathilde de toute ma confiance. Au fil des années, notamment dans le cadre des missions économiques à l'étranger, le prince Philippe a montré combien ses engagements envers notre pays lui tiennent à cœur. Et par dessus tout, avec le temps, j'ai appris que notre pays peut compter sur un atout extraordinaire : vous, mes chers concitoyens! Avec une population si riche de ses talents, de sa diversité, de son énergie, de sa générosité, l'avenir de notre pays est en de bonnes mains. C'est donc avec sérénité et confiance que je vous fais part de mon intention d'abdiquer ce 21 juillet 2013, jour de notre fête nationale, en faveur du prince héritier, mon fils Philippe.
Tout au long de mon règne, une conviction profonde a guidé ma conception de la fonction royale : le rôle du roi des Belges et sa légitimité est de se mettre au service de la démocratie et de ses concitoyens, seuls titulaires de la souveraineté. A cet égard, l'institution royale doit continuer à évoluer avec son temps. Comme de coutume, je m'adresserai encore à vous le 20 juillet prochain, et je participerai avec la Reine et les nouveaux souverains aux cérémonies du 21 juillet. Je souhaite déjà vous dire que ce fut pour moi un honneur et une chance d'avoir pu consacrer une large partie de ma vie au service de notre pays et de sa population.
La reine Paola et moi n'oublierons jamais tant de liens chaleureux tissés avec toute la population durant ces 20 dernières années. Nous vous remercions pour la confiance que vous nous avez témoignée, pour vos gestes de sympathie et de soutien, même empreints parfois de quelques critiques. Nous gardons dans notre cœur le souvenir de nombreuses rencontres dans des moments joyeux, mais aussi lors de grandes épreuves. Bien entendu, la fin de mon règne ne signifie pas que nos chemins maintenant se séparent, bien au contraire. Vive la Belgique!".
Peu après l'enregistrement de ce discours, le Roi et la Reine quittent le palais royal de Bruxelles, devant lequel plusieurs dizaines de jeunes se sont réunis avec des drapeaux belges dans une ambiance bon enfant. Après la diffusion du discours à 18h, le premier ministre Elio Di Rupo rend hommage à Albert II dans une allocution prononcée à 18h15, entouré de ses vice-premiers-ministres. Les chaînes de télévision bouleversent le programme de leur soirée pour évoquer cet événement historique et les nombreuses réactions.
Ce jeudi matin, en visite à Anvers, le prince héritier Philippe a confié brièvement : "Je voudrais aujourd'hui rendre hommage au Roi pour son règne de 20 ans. Je suis bien conscient des responsabilités qui pèsent sur moi. Je continuerai à m'investir de tout mon cœur".
Programme des prochains jours :
8 juillet : réception des membres du comité de mise en œuvre de la réforme de l'Etat fédéral par le roi Albert II, la reine Paola, le prince Philippe et la princesse Mathilde
10 juillet : réception des 5 premiers ministres (Jean-Luc Dehaene, Guy Verhofstadt, Yves Leterme, Herman Van Rompuy et Elio Di Rupo) du règne par le roi Albert II, la reine Paola, le prince Philippe et la princesse Mathilde
12 juillet : réception des ministres-présidents des régions et communautés par le roi Albert II, la reine Paola, le prince Philippe et la princesse Mathilde
15 juillet : réception du gouvernement fédéral par le roi Albert II, la reine Paola, le prince Philippe et la princesse Mathilde
16 juillet : présentation au Sénat des nouveaux bustes du roi Albert II et de la reine Paola par l'artiste Wilfried Pas, puis remise d'un cadeau par les présidents de la Chambre et du Sénat aux souverains au palais royal
17 juillet : visite du roi Albert II et de la reine Paola à Gand à l'occasion de leurs 20 ans de règne
18 juillet : visite du roi Albert II et de la reine Paola à Eupen à l'occasion de leurs 20 ans de règne
19 juillet : visite du roi Albert II et de la reine Paola à Liège à l'occasion de leurs 20 ans de règne
20 juillet : diffusion du dernier discours télévisé et radio du roi Albert II, concert en soirée de l'Orchestre National de Belgique au palais des Beaux-Arts de Bruxelles en présence de toute la famille royale, puis bal populaire dans le quartier défavorisé des Marolles
21 juillet : Te Deum de la fête nationale en la cathédrale Saints-Michel-et-Gudule, abdication du roi Albert II, prestation de serment du nouveau roi Philippe à la Chambre, et défilé militaire de la fête nationale sur la place des Palais
31 juillet : messe à la cathédrale Saints-Michel-et-Gudule à Bruxelles pour les 20 ans du décès du roi Baudouin en présence de toute la famille royale
Merci Sire.
RépondreSupprimerJacques Stoffels
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MERCI au Roi Albert II
RépondreSupprimerBon et beau règne au Roi Philippe de Belgique.
Il va nous manquer, mais on le reverra surement.
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