(Article actualisé en juillet 2022)
1° Qu'est-ce que le micro-crédit ?
Créé au début des années 70, le micro-crédit est d'abord lancé au Bangladesh par la Grameen Bank du professeur Mohammad Yunus suite à un diagnostic simple : l'absence d'accès au crédit des plus pauvres les prive de la possibilité d'entreprendre. Le principe est d'octroyer des petites sommes à des taux exceptionnellement bas. Le professeur Yunus a été soutenu, entre autres, par le roi Baudouin et la reine Fabiola, le président des Etats-Unis Bill Clinton et la reine Sophie d'Espagne. En 2005, il existait plus de 3.000 organisations de ce type dans ce monde qui sont venues en aide à près de 54,8 millions de personnes (dont 81% de femmes) disposant d'un revenu quotidien inférieur à un dollar.
2° Emissaire pour la promotion de l'Année Internationale du Micro-Crédit
Le 17 novembre 2004, les princesses Mathilde de Belgique et Maxima des Pays-Bas, le ministre belge de la Coopération au Développement Armand De Decker assistent à New York au lancement de l'Année Internationale du Micro-Crédit, déclarée par l'ONU pour 2005. Le micro-crédit est un des outils permettant de lutter contre la pauvreté et d'atteindre les Objectifs de Développement du Millénaire des Nations Unies, notamment sur le plan de l'éducation et de la santé. La princesse Mathilde a été sollicitée par le Programme des Nations Unies pour le Développement, afin d'agir en tant qu'émissaire pour la promotion du micro-crédit dans le monde.
Voici l'intégralité de son discours prononcé à New York :
"Je suis ravie d'être parmi vous aujourd'hui pour l'inauguration de l'Année Internationale du Micro-Crédit. Comme membre du groupe des émissaires, je suis heureuse de pouvoir soutenir une initiative aussi dynamique et ambitieuse. J'adhère pleinement à notre objectif principal, qui est de soutenir ceux qui à travers le monde entier souhaitent emprunter des sommes modestes pour démarrer leur propre entreprise, et ce malgré leurs très faibles revenus. Je suis impatiente de contribuer à cette année internationale, et ma première activité dans ce cadre aura lieu dès la semaine prochaine en Chine, où j'aurai l'occasion de rendre visite à des bénéficiaires de micro-crédits et de parler de ce sujet devant des auditoires universitaires.
La micro-finance est l'un des instruments les plus puissants dans la lutte contre la pauvreté. Les micro-crédits augmentent le patrimoine et les revenus des ménages modestes et aident ceux-ci à faire face aux besoins essentiels. Il en résulte une amélioration substantielle des conditions de logement, des soins de santé et de l'éducation apportée aux enfants. La micro-finance encourage les femmes à participer davantage à la vie économique et contribue également à la promotion de l'égalité des sexes au sein des familles. Enfin, la micro-finance apparaît comme cruciale pour la réalisation des objectifs de développement fixés à l'aube du millénaire, et tout spécialement l'objectif de réduire de moitié, d'ici 2015, le nombre de personnes vivant dans une pauvreté extrême.
Malgré les perspectives qu'ils peuvent offrir, les services financiers sont pourtant encore refusés à la grande majorité de la population des pays en développement. Il faudra saisir l'occasion offerte par cette année internationale pour répondre à une question de fond : pourquoi persiste-t-on à considérer aujourd'hui encore que les personnes à revenu modeste ne sont pas dignes de crédit? Ceux qui ont peu de moyens ne souhaitent pourtant pas vivre de la charité, mais veulent au contraire pouvoir saisir des opportunités. Beaucoup d'entre eux travaillent à l'arrachée. Les micro-entrepreneurs constituent le segment le plus énergique des sociétés en développement et produisent un effet dynamisant sur l'ensemble de la population. La preuve est apportée depuis longtemps que lorsqu'elles ont un accès aux services financiers, ces personnes créent leur entreprise, remboursent leurs emprunts, épargnent de l'argent et offrent de meilleures conditions de vie à leurs familles et, particulièrement à leurs enfants.
Si nous encourageons l'esprit d'entreprise au sein des populations en développement, nous franchissons une étape cruciale dans l'éradication de la pauvreté. Notre devoir est de réduire les obstacles qui empêchent la participation de ces populations à la vie économique et financière. Avec l'aide de vous tous dans cette salle, nous saisirons l'occasion offerte par l'Année Internationale du Micro-Crédit pour promouvoir des instruments financiers d'inclusion qui permettront aux micro-entrepreneurs de se révéler économiquement et, par-dessus tout, de s'épanouir humainement.
L'année internationale qui s'ouvre sera capitale pour promouvoir le concept du micro-crédit. Mais nous savons déjà que notre engagement devra se poursuivre au-delà de l'année 2005. Car seul un effort inscrit dans la durée produira un résultat durable. C'est un objectif pour lequel je suis, avec vous, déterminée à oeuvrer et à m'engager".
Quelques jours plus tard, lors d'une mission économique en Chine, la princesse découvre un premier projet de micro-crédit dans les campagnes pauvres aux abords de Pékin : l'épouse d'un petit agriculteur a reçu un crédit pour acheter des semences et cultiver des fleurs dans une serre de fortune. Grâce à cette activité, elle peut envoyer leurs enfants à l'école. Lors de sa visite de l'université de Fudan, Mathilde entame un débat sur le micro-crédit avec des étudiants.
Au cours de son voyage au Mali en février 2005, elle se rend à l'agence de micro-crédit Kafo Jiginew (le grenier de l'argent) financée notamment par la coopération belge au développement. Plus de 90.000 crédits (parfois réduits à 50 euros) ont déjà été accordés à toute personne souhaitant lancer son affaire à la ville comme à la campagne. Après la présentation théorique, la princesse rencontre dans les dédales du marché de Medine des femmes ayant sollicité l'appui financier de Kafo Jiginew.
De retour à Bruxelles, Mathilde prononce un discours au palais d'Egmont lors de la séance de clôture du séminaire "Micro-finance : facteur d'intégration sociale?" :
"La semaine dernière, j'étais en mission au Mali. J'ai eu l'occasion de m'entretenir avec plusieurs micro-entrepreneurs. J'ai été vraiment impressionnée par leur enthousiasme et leur engagement. Ils travaillent avec détermination afin de sortir de la pauvreté et de s'assurer un meilleur avenir. Surtout les femmes sont très actives et présentes dans le secteur du micro-crédit. Lors de mes conversations avec eux, j'ai personnellement constaté que les micro-clients ne souhaitent pas vivre de la charité, mais qu'ils veulent au contraire saisir des opportunités : un commerce de chaussures ou de fruits, une bijouterie, une laiterie, un marché de bétail...pour ne citer que quelques exemples. Grâce à un accès aux services financiers, ces personnes à revenu modeste créent leurs propres entreprises, remboursent leurs emprunts, épargnent de l'argent et offrent de meilleures conditions de vie à leur famille, et particulièrement à leurs enfants.
Il existe là un grand potentiel commercial qui mérite d'être développé. Bien que la micro-finance soit un outil important dans la lutte contre la pauvreté, cet instrument n'est pas une panacée! En effet, des obstacles continuent à exister empêchant la participation des populations en développement à la vie économique et financière. Nous devons saisir l'occasion offerte par l'Année Internationale du Micro-Crédit pour promouvoir des instruments financiers d'inclusion qui permettent aux micro-entrepreneurs de se révéler économiquement et de s'épanouir humainement.
En acceptant le mandat d'émissaire des Nations Unies pour l'année internationale, je me suis engagée dans cette voie. Je voudrais rappeler ici que la pauvreté a trop souvent un visage féminin. Et pourtant, ce sont les femmes moteurs de la famille, pleines de talents et d'innovations, qui ont largement recours aux services des institutions de micro-finance. Cela non seulement afin d'accéder aux services financiers dont elles ont besoin, mais peut-être surtout afin d'améliorer leur statut, leurs conditions de vie et celles de leurs enfants, en leur assurant une bonne éducation et un meilleur accès aux soins de santé.
Je suis très heureuse de votre présence à ce séminaire micro-finance ici à Bruxelles. Vous qui représentez des institutions de micro-finance, des investisseurs sociaux, des organisations d'appui au secteur de la micro-finance, des institutions financières, des organisations non gouvernementales ou encore des administrations publiques, vous avez accepté de soutenir ceux qui, à travers le monde entier, souhaitent emprunter des sommes modestes pour démarrer leur propre entreprise, et ce malgré leurs très faibles revenus. Ces deux derniers jours, vous avez examiné les défis du sytème de la micro-finance, y compris les obstacles économiques et financiers à la participation des personnes pauvres.
De mon côté, je voudrais signaler l'importance de l'impact social de la micro-finance. Notre attention pour les conséquences sociales du micro-crédit devrait aller de pair avec nos considérations économiques et financières d'une part, et l'impact social d'autre part. Je vous invite à tenir compte dans votre travail de l'inclusion sociale et du renforcement de la société. A travers la qualité de vos travaux au cours de ce séminaire, je mesure également cet engagement, cette détermination de tous les acteurs du secteur et cette volonté d'encore améliorer votre action. Je vous invite à poursuivre cette solidarité avec les micro-entrepreneurs, non seulement durant l'année internationale, mais aussi après 2005. Seuls des efforts durables pourront être couronnés de succès".
Le 9 mars, Mathilde remet à Bruxelles le 6ème Womed Award, destiné à couronner une femme chef d'entreprise indépendante qui marie harmonieusement sa société, sa vie privée et ses engagements auprès de la communauté. En cette Année Internationale du Micro-Crédit, le prix voit double et a été également attribué à une businesswoman d'un pays en voie de développement
Lors de la mission économique menée par le prince Philippe en Inde en mars, son épouse s'est rendue dans une association de femmes "Mahilan Milan" qui supervise 35.000 familles en accordant des micro-crédits aux mères pour les aider à commencer une petite activité commerciale (nettoyage, restauration, p.ex.) et aussi à restaurer leur estime de soi. La princesse Mathilde prononce, le 19 avril, un nouveau discours sur le micro-crédit à l'Université de Georgetown au cours d'une visite officielle avec le prince héritier à Washington aux Etats-Unis.
Le 2 juin, elle visite la banque Triodos à Bruxelles afin d'être informée sur les activités internationales de cette banque dans le domaine du micro-crédit. Le 21 juin, elle participe à une réunion à Paris de conseillers des Nations Unies. Ceux-ci font une évaluation sur le déroulement positif de l'Année Internationale du Micro-Crédit et sur la stratégie à suivre dans l'avenir. Enfin, le 6 juillet, Mathilde assiste à Bruxelles à un déjeuner de travail sur les micro-crédits avec des représentants de la Commission Européenne et la Banque Européenne d'Investissement.
La naissance de son troisième enfant le prince Emmanuel en octobre 2005 l'empêche de mener des actions en faveur du micro-crédit au cours de l'automne. Le 6 décembre, la princesse remet au palais royal le Prix Princesse Mathilde 2005 (d'une valeur de 9.000 euros) à l'asbl Credal pour son projet "Affaires de femmes, femmes d'affaires".
D'autres activités officielles sur ce thème ont lieu en 2006 : visite de l'asbl Credal à Louvain-la-Neuve, discours sur la micro-finance au Collège d'Europe à Bruges, conférence organisée par l'European Microfinance Programme de la Solvay Business School à Bruxelles, colloque sur la micro-finance organisé par la commission Globalisation du Sénat, réunion de travail avec les premiers diplômés de l'European Microfinance Programme qu'elle avait déjà rencontrés quelques mois plus tôt.
3° Son soutien se poursuit
Depuis lors, la princesse Mathilde s'est engagée pour d'autres causes, mais des activités en lien avec le micro-crédit sont de temps en temps à son agenda : conférence à Ixelles du professeur Mohammad Yunus (fondateur de la Grameen Bank, inventeur du micro-crédit et Prix Nobel de la Paix 2006), inauguration à l'ULB du Centre Européen de Recherche en Microfinance en 2007, visite de Micro Start à Schaerbeek et Saint-Gilles (un projet pilote soutenu par l'Union Européenne qui fournit, conseille, accompagne et aide lors de la création d'une petite entreprise les personnes exclues du système bancaire classique), table ronde sur la micro-finance en Thaïlande avec l'Asian Development Bank et des ONG actives dans ce domaine en 2013.
Devenue reine, Mathilde continue de s'y intéresser : European Microfinance Day 2015 à Bruxelles, nouvelle entrevue avec Mohammad Yunus au forum économique mondial de Davos en 2016, lancement à Liège de la Semaine du Micro-Crédit et rencontre avec l'équipe de l'agence Micro Start en 2016, découverte d'un projet de micro-finance à New Delhi lors du voyage d'Etat en Inde en 2017, visite du projet de micro-crédit "Way-Lunch and Coffee Bar" à Gand en 2018, rencontre avec l'équipe de Micro Start Charleroi en 2021, discours d'ouverture de la conférence annuelle du Réseau Européen de la Microfinance et visite de l'agence anversoise de Micro Start en 2022.
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