Le 14 janvier, les souverains visitent le Bureau Central de Recherches de la gendarmerie en compagnie des parents de 25 enfants disparus. Deux semaines plus tard, la reine Fabiola remet à la famille de Loubna Ben Aïssa (disparue en 1992 à Ixelles) le Prix des Médias 1996 de la Fondation Roi Baudouin.
Dans son discours de Nouvel An 1997 aux corps constitués, le Roi invite les autorités à l' "humilité et la remise en question", évoque la maltraitance des enfants et se prononce pour un centre européen pour la recherche des enfants disparus, avant de répéter la promesse du couple royal de participer activement à la lutte pour la protection et le respect de la dignité des enfants en mémoire de Julie, Mélissa, An et Eefje.
Dans la nuit du 5 mars, des enquêteurs découvrent dans le sous-sol d'une station-service d'Ixelles les restes de Loubna, disparue et décédée en 1992. La Belgique retombe dans l'horreur et l'indignation : comment le Parquet de Bruxelles n'a-t-il pas enquêté sur Patrick Derochette, un pédophile déjà emprisonné et habitant à 100m du domicile des Ben Aïssa?
Dès le lendemain, le Roi téléphone à la famille de Loubna et les invite à se rendre au château de Laeken pour une nouvelle rencontre avec le couple royal. Le 8 mars, les funérailles ont lieu à la grande mosquée de Bruxelles en présence de parents d'enfants disparus, de Claude Lelièvre, de Marie-France Botte, d'un aide de camp du Roi et de plusieurs responsables politiques. Le corps de Loubna est ensuite inhumé à Tanger au Maroc, d'où est originaire la famille Ben Aïssa, en présence de 10.000 personnes.
En tant que sénateur de droit, le prince Philippe assiste à la séance du 19 mars de la Commission de l'Intérieur et des Affaires Administratives du Sénat sur la création d'un centre pour la recherche des enfants disparus à Bruxelles. Quelques jours plus tôt, le Roi avait reçu en audience le responsable du projet, Pierre-Martin Neirinckx. Ce n'est pas un hasard si ce dernier est un collaborateur de la Fondation Roi Baudouin... Albert II était bien décidé à faire tout ce qui était en son pouvoir pour que ce centre voit le jour.
La reine Paola se rend le 25 avril incognito au domicile des Ben Aïssa à Ixelles pour leur apporter son soutien dans leur recherche de la vérité et pour les féliciter à l'occasion de la naissance du petit Zaccharia. Notre souveraine avait beaucoup de respect et de sympathie pour la dignité de cette famille immigrée (la grande soeur Nabela en particulier).
Le 21 mai, le Roi, la Reine, la princesse Astrid et le prince Lorenz participent à l'inauguration dans le parc royal de Bruxelles de la sculpture de Jean-Michel Folon, "Le messager", dédié aux enfants disparus. Parmi les nombreux élèves venus avec leurs enseignants, on a reconnu Amedeo et Maria-Laura, les enfants de la princesse Astrid. Quatre jours plus tard, le couple royal assiste à la séance d'ouverture du forum national "Les enfants nous interpellent", organisé au palais des Congrès de Bruxelles par la Commission Nationale contre l'exploitation sexuelle des enfants.
Au cours de ce premier semestre de 1997, Albert II suit avec attention les travaux de la commission de la Chambre sur les disparitions d'enfants : il reçoit en audience son président Marc Verwilghen, ses rapporteurs Renaat Landuyt et Nathalie de 't Serclaes, deux autres députés membres Tony Van Parys et Vincent Decroly. Des parents d'enfants disparus sont aussi conviés au palais royal, comme Marie-Noëlle Bouzet, la mère d'Elisabeth, le 23 juin.
Mais le Roi n'oublie cependant pas la politique étrangère de la Belgique : il se rend en mars aux sièges de la Commission Européenne et de l'Otan à Bruxelles. Quelques mois plus tôt, il avait été le premier chef d'Etat à rendre visite à l'Etat-Major de l'Eurocorps à Strasbourg. Dans son discours devant le conseil de l'Otan, Albert déclare notamment :
"Notre continent doit faire face à de nouveaux défis. L'Alliance assume, elle aussi, une responsabilité importante dans les réponses qui y seront apportées. En effet, l'Alliance a non seulement pour mission d'assumer la protection des Etats membres, mais sa responsabilité historique en matière de paix et de prospérité est plus large et s'étend à tout le continent.
L'élargissement de l'Otan est une de ces questions historiques. La solidarité accrue et une coopération plus poussée augmenteront la stabilité de notre continent et le bien-être de nos populations. L'histoire ne nous enseigne-t-elle pas à profusion que les lignes de fracture en Europe furent toujours à l'origine de tensions et de conflits? Par ailleurs, l'Alliance est encore interpellée par une autre sollicitation. Les progrès de l'intégration économique et politique de l'Europe suscitent par eux-mêmes un besoin grandissant d'identité européenne en matière de défense et de sécurité. Au sein de cette organisation également, l'identité européenne peut être renforcée dans un esprit de solidarité transatlantique.
Alors que l'Alliance se trouve au seuil d'une phase nouvelle de son existence, je tiens à répéter ici, solennellement, que la Belgique maintiendra ses efforts pour que l'Otan puisse assumer sans relâche son rôle de garant de la paix. Depuis plus de trente ans, l'Organisation du Traité de l'Atlantique Nord s'est fixée à Bruxelles. Elle y est bien enracinée et une longue tradition de coopération et de dialogue s'est établie entre son secrétariat et mon pays. Lorsque nos amis d'Europe centrale et orientale, avec lesquels nous avons désormais tant d'affinités, auront rejoint l'Alliance, ou auront développé avec elle des liens privilégiés, alors encore mon pays se sentira appelé à accueillir cette Otan renouvelée. En tant que pays hôte, la Belgique, comme par le passé, ne ménagera aucun effort pour assurer le bon fonctionnement de l'Alliance du XXIème siècle".
Dans son discours télévisé du 21 juillet 1997, le Roi évoque les réformes de la justice entreprises par le gouvernement fédéral et les Assises de la Démocratie organisées par le président de la Chambre Raymond Langendries. Il parle aussi de la situation économique de notre pays :
"Dans la lutte pour l'emploi, des changements sont perceptibles et méritent d'être stimulés. Des mesures ont été prises pour diminuer les cotisations de sécurité sociale et donc le coût du travail. Elles devront être renforcées dans la limite des moyens budgétaires disponibles. Par ailleurs, les efforts consentis pour introduire une plus grande flexibilité dans les entreprises doivent être poursuivis. Il en va de même dans la répartition du volume de l'emploi. Exploitons davantage et sans a priori les perspectives offertes par le travail à temps partiel.
Chacun perçoit mieux la priorité à accorder à l'emploi par rapport à l'accroissement des rémunérations. Les opportunités offertes par la société de la connaissance et des communications, de même que notre position centrale dans une Europe en pleine mutation, doivent stimuler notre esprit d'entreprise et d'innovation. Nous devons donc créer des activités nouvelles, en particulier par l'intermédiaire des petites et moyennes entreprises.
Il me semble, par ailleurs, que dans ces différents domaines, des convergences d'opinion se développent chez les partenaires sociaux tant au niveau fédéral que dans chacune de nos régions et je voudrais réitérer ici l'appel au consensus social pour l'emploi que je lançais, il y a quatre ans, lors de ma prestation de serment".
Lors de son voyage d'Etat en Autriche en octobre 1997, le Roi évoque la construction européenne lors du dîner de gala : "Bientôt, l'Union envisagera son élargissement qui correspond d'ailleurs à sa vocation historique. L'Autriche connaît bien nos futurs partenaires d'Europe centrale et de l'Est. Elle pourra donc jouer un rôle de premier plan dans les négociations qui s'annoncent. Mon pays espère que l'étroite coopération avec l'Autriche se poursuivra au sein de cette Union élargie. Dans ces différents domaines, la conférence intergouvernementale a posé des jalons importants, mais l'avenir de l'Union exige davantage. L'Europe ne réussira bien que si elle parvient à répondre en termes simples aux préoccupations des gens, à leurs inquiétudes et à leurs espoirs. Ainsi, nous devons être particulièrement attentifs aux aspirations exprimées lors des funérailles de Mère Térésa et de la princesse de Galles par des millions de personnes. Elles demandent un monde moins technocratique, un monde plus humain, plus chaleureux, plus attentif à la pauvreté et à toutes les détresses. L'Europe réussira bien lorsque nous cesserons de rechercher uniquement nos intérêts propres et immédiats".
Dans ce discours, il déclare également : "Votre pays a récemment, et plus que d'autres sans doute, été le témoin des horribles conflits ethniques dans les Balkans. Nombreux furent ceux qui fuyant la guerre et la dictature dans ces régions bouleversées, trouvèrent un refuge en Autriche. Il est clair que ces immigrants nous font prendre une conscience plus aigüe des droits et des libertés des autres et qu'il ne suffit pas de reconnaître leur altérité mais qu'il faut aussi l'accepter. Des pays comme les nôtres sont appelés à montrer l'exemple en matière de tolérance et de respect de l'autre, car aucun peuple ne peut vivre uniquement pour lui-même". Quelques années après ce discours, l'extrême-droite entre dans le gouvernement autrichien... Au cours de l'année 1997, Albert II a reçu en audience à deux reprises Johan Leman, le directeur du Centre pour l'Egalité des Chances et la Lutte contre le Racisme.
Après avoir à nouveau rencontré quelques parents, le couple royal organise le 23 octobre une seconde table ronde au palais royal, au cours de laquelle la Commission Nationale contre l'exploitation sexuelle des enfants présente son rapport. Les parents trouvent cependant cette réunion moins constructive que la première. Dans son discours de Noël, le Roi évoque de nouveau l'enfance maltraitée, mais la replace dans un contexte plus vaste : celui de la violence qui mine une société en perte de valeurs.
Accompagnés du premier ministre Jean-Luc Dehaene et du ministre des Transports Michel Daerden, le Roi et la Reine rehaussent de leur présence le voyage inaugural du Thalys qui met Paris à 1h18 de la gare de Bruxelles-Midi. Accueillis le 10 décembre par le ministre français des Transports et le président de la SNCF, nos souverains prennent la direction du palais de l'Elysée pour un déjeuner avec le président de la République Jacques Chirac et son épouse Bernadette.
L'unité de la Belgique reste une préoccupation constante pour Albert II qui en parle dans ses deux discours télévisés de l'année 1997. Ainsi le 21 juillet :
"Tout au long de l'année, j'ai perçu chez de très nombreux citoyens, dans chaque région, beaucoup de signes montrant clairement combien notre société multiculturelle, où plusieurs langues sont utilisées, est considérée comme une source de richesse tant sur le plan humain que sur le plan économique et social. Beaucoup, hors de nos frontières, voient en notre pays un modèle possible pour la coexistence harmonieuse des différentes cultures européennes, coexistence basée sur le respect mutuel et le soutien réciproque. Certes, notre histoire nous a appris à nous battre pour l'autonomie de nos cités, de nos provinces et de nos régions, mais cette histoire nous enseigne aussi que les défis importants n'ont été relevés avec succès que dans l'union de nos forces".
Nouvelle allusion dans le discours de Noël : "En reprenant une idée chère à mon frère le roi Baudouin, j'aimerais insister sur le fait que notre pays a la chance de se trouver au confluent des grands courants culturels européens. Chacun de nous peut ainsi, tout en étant enraciné dans sa propre culture, s'enrichir de celle de l'autre. Cela suppose évidemment un effort d'écoute, un esprit curieux, ouvert et tolérant. Encourageons cet enrichissement réciproque. Ses effets bénéfiques se répandront dans tous les aspects de notre vie en commun, qu'ils soient culturels, politiques, économiques ou sociaux. Rejetons ce qui divise et sépare ; encourageons ce qui rassemble et unit".
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Je songe à imprimer cette série pour mettre tout ça dans mes dossiers concernant les monarchies, sincèrement c'est très intéressant, espérons que le format me le permettra.
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