Juillet 2016 : voyage de la princesse Maria-Esmeralda au Brésil
Du 3 au 7 juillet, la princesse Maria-Esmeralda s'est rendue au Brésil sur les traces de son père et de ses grands-parents. Au programme de son voyage : inauguration d'un buste de la reine Elisabeth dans les jardins de l'ambassade de Belgique à Brasilia, visite du village de Porteira afin de rencontrer le peuple indigène des Xerente (le roi Léopold III avait déjà rencontré cette communauté lors d'une expédition au Brésil dans les années 60), rencontre avec le vice-gouverneur et le gouverneur de l'Etat du Tocantins, visite du projet social "Kritzelei" à Sao Sebastiao (dans lequel la chanteuse belge Dorka Hepp est impliquée en faveur de filles et adolescentes de 9 à 18 ans), inauguration au Mémorial des Peuples Indigènes de Brasilia de l'exposition des photos prises par Léopold III lors de son voyage au Brésil en 1964
Août 2016 : le roi Philippe et la reine Mathilde aux Jeux Olympiques de Rio
Le couple royal s'est rendu au Brésil pour les premières journées des Jeux Olympiques 2016 de Rio : cérémonie d'ouverture, visite du Village Olympique, réception offerte aux chefs d'Etat et de gouvernement présents par le président intérimaire du Brésil Michel Temer, rencontre avec les responsables d'un projet social de l'ONG belge Kiyo, rencontre avec le président du Comité International Olympique Thomas Bach, réception du Comité Olympiques et Interfédéral Belge, ainsi que diverses épreuves sportives auxquelles participaient des Belges (judo, hockey, tennis, haltérophilie, p.ex.).
C'est le deuxième voyage de nos souverains au Brésil depuis le début de leur règne. En effet, ils s'y étaient rendus un week-end en 2014 pour assister à un match des Diables Rouges dans le cadre de la Coupe du Monde de football. Ils en avaient profité pour dévoiler la nouvelle plaque de l'avenue dédiée à la reine Elisabeth et déposer des fleurs devant le buste du roi Albert Ier (ces deux hommages du Brésil aux souverains belges rappellent leur voyage dans ce pays en 1920).
Avant 2014 et 2016, il y a eu d'autres visites de notre famille royale au Brésil, mais celle qui est restée dans les mémoires, c'est celle du roi Albert Ier et de la reine Elisabeth (voir ci-dessous).
Le voyage du roi Albert Ier et de la reine Elisabeth au Brésil en 1920
En voici le compte-rendu que j'ai trouvé dans le livre "Elisabeth de Belgique : les défis d'une reine" de l'historien Georges-Henri Dumont :
"Pour de multiples raisons, les souverains belges avaient accepté l'invitation officielle que leur avait faite le président brésilien Epitacao Pessoa. Le Brésil était entré dans la guerre aux côtés des Alliés en 1917. Assez modestement sur le plan militaire (il s'était contenté d'envoyé une petite flotille dans les mers septentrionales), mais c'est en grandes quantités qu'il avait expédié des médicaments et des vivres. La Belgique ne l'avait pas oublié. Et puis Elisabeth n'était-elle pas une Bragance par sa mère, une "fille des enfants de lumière", selon les mots de Camoëns? République depuis 1889, le Brésil se souvenait néanmoins du roi Joao VI et surtout de don Pedro qui avait proclamé l'indépendance en 1822 et pris le titre d'empereur. Les Brésiliens considéraient Elisabeth presque comme des leurs. Enfin, les souverains belges, qui avaient l'intention de se rendre bientôt au Congo, étaient heureux de l'occasion qui leur était offerte de parcourir une région tropicale. La Reine avait d'ailleurs demandé au docteur Nolf de l'accompagner afin d'enquêter sur place sur le diagnostic et le traitement des maladies tropicales.
L'embarquement eut lieu le mercredi 1er septembre 1920 au port de Zeebrugge, où avait accosté le cuirassé brésilien "Sao Paulo". Avant de franchir la passerelle et de faire ses adieux à ses trois enfants, la Reine s'entretint pendant quelques instants avec les orphelins de marins et de pêcheurs, élèves de l'école Ibis, venus lui offrir des fleurs. Puis ce furent la montée à bord, les traditionnelles acclamations de la foule massée sur le môle ou les toits des hangars, les hymnes nationaux, les ancres levées, les amarres lâchées.
La traversée fut presque sans histoire. La Reine qui aimait la chaleur et en éprouvait le besoin physique se dorait volontiers au soleil, un livre à la main. L'équipage était surpris par sa jovialité et son apparente simplicité. Elle se mêlait aux habituels jeux de bord qu'elle connaissait bien depuis son voyage aux Etats-Unis. Et le soir, elle prenait souvent sa place parmi les violonistes de l'orchestre. Comme c'était la première fois qu'elle franchissait la ligne de l'équateur, il lui fallut subir l'épreuve du baptême par le roi Neptune. En souvenir de quoi les marins lui offrirent un poudrier en cristal et bronze.
Escorté de dix torpilleurs, le "Sao Paulo" pénétra majestueusement dans la baie de Rio au début de l'après-midi du dimanche 19 septembre 1920. Pendant que, sous un soleil éclatant, les forteresses de Santa Cruz, Sao Joao et Imbuhy saluaient le cuirassé de leurs canons, soixante-quatre rameurs conduisaient vers le Roi et la Reine une galiote toute blanc et or. C'était l'historique "Dom Joao VI", construite en 1808, venue du Portugal lorsque l'arrière-grand-père maternel d'Elisabeth, fuyant l'occupation napoléonienne, s'était exilé en terre brésilienne.
Albert et Elisabeth, accueillis par le président Epitacao Pessoa, sa femme et sa fille, descendirent dans la galiote qui les mena au débarcadère. Discours, cortège triomphal jusqu'au palais de Guanabara, apparitions au balcon : la visite officielle commençait. Trop, beaucoup trop officielle au gré de la Reine. Les autorités brésiliennes avaient cru bien faire en montrant à leurs hôtes combien leur pays était européanisé. Réception au parlement, soirées de gala au théâtre, parades militaires, garden-parties, concours hippique, match de football : rien ne leur fut épargné alors qu'ils souhaitaient essentiellement rencontrer ceux qui luttaient difficilement pour le développement, les dirigeants d'établissements industriels, les responsables de l'urbanisme aux prises avec l'extension des favellas, etc.
Le mardi 27 septembre, après une semaine de cérémonies aussi lassantes que brillantes, la Reine, accompagnée du docteur Nolf et de la comtesse de Caraman-Chimay, put enfin visiter l'Institut de Médecine Tropicale Oswaldo-Cruz situé dans un faubourg de Rio. Elle s'y fit notamment expliquer comment, en quelques années, le docteur Oswaldo-Cruz, un élève de Pasteur, avait réussi à éradiquer la fièvre jaune apportée en 1849 par des navires venant d'Amérique centrale. Nommé directeur de la Santé publique par le président Rodriguez Alvoz, il avait constitué une brigade de 1.500 hommes qui procédèrent systématiquement à l'assèchement ou à la pétrolisation des marais, au nettoyage régulier des petites rivières et à l'examen quotidien des égouts de la capitale. Les résultats ne s'étaient guère fait attendre : dès 1903, la mortalité due à la fièvre jaune était tombée à 584 décès. En 1908, on n'en enregistrait plus que 4 et l'année suivante, plus du tout. Le docteur Chagaz, successeur de Cruz, étendit le domaine des recherches de l'Institut de Médecine Tropicale aux épidémies qui décimaient le bétail. Après avoir entendu les paroles élogieuses de la Reine, Chagaz et ses collaborateurs signalèrent à celle-ci qu'ils connaissaient et appréciaient les travaux de plusieurs médecins belges, notamment le docteur Jules Bordet.
La flore brésilienne fascinait la Reine. Aussi voulut-elle passer de longues heures au jardin botanique où on lui fit admirer le premier palmier que son arrière-grand-père, le roi Joao du Portugal, planta en 1808. Albert Ier, qui semblait soucieux depuis qu'il savait son gouvernement menacé par les démissions successives du ministre de la Défense Nationale et du ministre des Colonies, planta, lui aussi, un arbre pour commémorer sa visite : un metrodora. Pour compenser les effets débilitants de la chaleur humide de Rio de Janeiro, les souverains furent conviés à passer un jour et une nuit dans une plantation de café établie dans la montagne. La Reine en profita pour chevaucher dans la région, tantôt au trot, tantôt au galop. A un moment donné, elle piqua des deux à la poursuite d'un immense papillon bleu. Epuisés par son rythme, transpirant, la plupart des membres de sa suite abandonnèrent, l'un après l'autre, la randonnée. Elle, elle continuait, joyeuse et fougueuse comme aux beaux jours de Possenhofen.
Le périple brésilien conduisit Albert et Elisabeth à la ville résidentielle de Petrópolis, à Theresopolis peuplée de colons allemands et suisses, à Belo Horizonte, la nouvelle capitale de l'Etat de Minas Gerais, construite de toutes pièces en quelques années sur l'emplacement d'un village perdu, à Sao Paulo où le prince Léopold vint rejoindre ses parents. A nouveau, trop de cérémonies officielles, mais aussi un enthousiasme populaire délirant, ponctué à chaque gare de salves de fusil et de coups de revolver. Le roi Albert prononça une nouvelle série de discours de remerciement dans le style banal qui convenait. Toutefois, lors de la réception à la Cour de Justice de Belo Horizonte, il glissa une petite phrase qui ne passa pas inaperçue : "Plus un pays avance dans la civilisation, plus le pouvoir judiciaire y occupe une situation indépendante et respectée".
Quant à la Reine, elle visita à Sao Paulo le couvent de l'ordre belge de Saint-Vincent dont l'école était fréquentée par les enfants de la classe ouvrière. Et pour ne pas faire de discrimination, elle s'arrêta aussi chez les sœurs de Saint-Augustin, un autre ordre belge, qui réservaient leur enseignement aux enfants de ce qu'on appelait la "bonne société".
Le vendredi 8 octobre, le Roi, la Reine et le prince Léopold partirent pour la plaine de Campinas, le plus ancien centre de plantations de café de la région. A cheval, ils montèrent jusqu'à l'important institut zootechnique. Puis ce fut la visite des différents centres agricoles de la Fazenda de Guatapara, suivies de celle du port de Santos aux entrepôts bourrés de sacs de café.
Le voyage se termina comme il avait commencé : à bord du "Sao Paulo". A l'escale de Lisbonne, Elisabeth retrouva le souvenir de ses ancêtres : pour elle, les Portugais tirèrent les carrosses royaux exposés au musée près de la tour de Belem".
(extrait de "Elisabeth de Belgique : les défis d'une reine" de Georges-Henri Dumont)
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